C.N.R.S.
 

DÉRom en anglais
 
Dictionnaire Étymologique Roman
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*/ˈarbor‑e/ s.f. « plante au tronc ligneux qui se ramifie à une certaine hauteur ; espar planté sur le pont ou dans la quille d’un navire ; pièce qui sert de support à d’autres pièces animées »

I. Genre féminin originel (monosémique)

I.1. Sens « arbre »

I.1.a. Type originel (sans dissimilation)
*/ˈarbor‑e/ > sard. árƀore s.f. « plante au tronc ligneux qui se ramifie à une certaine hauteur, arbre » (dp. ca 1110/mil. 13e s. [arbores], CSMBVirdis 196 = DES ; PittauDizionario 1 ; AIS 533 p 937, 943, 949 ; 1251 p 943 ; cf. WagnerFonetica 288), itsept. ˹arbor˺ (LEI 3, 759, 761)1, oïl. arbre (dp. 1er qu. 12e s., BrendanS 43, 52 = TL ; FEW 25, 88a [norm. hbret. centr.] ; AND2 ; DMF2010 ; ALN 426 p 55, 67 ; ALBRAM 307 p 85, 86 [« pommier »] ; ALCe 112)23, gal. árbore/port. árvore (dp. 13e s. [aruor], Houaiss ; DDGM ; Buschmann ; DRAG1 ; Piel,Biblos 8, 389 ; DELP3 ; CunhaÍndice ; CunhaVocabulário2 ; ALPI 17 ; cf. WilliamsPortuguese § 96)4.

I.1.b. Type dissimilé */-r-r-/ > */-l-r-/
*/ˈalbor‑e/ > sard. álƀore s.f. « arbre » (DES s.v. árƀore ; PittauDizionario 1 ; AIS 533 p 942, 957 ; 1251 p 942), ait. albore (dp. ca 1230/1250 [atosc. albor], TLIO s.v. albero ; LEI 3, 759).

I.1.c. Type dissimilé */-r-r-/ > */-r-l-/
*/ˈarbol‑e/ > aesp. arbol s.f. « arbre » (1241 – 1493/1495, Pietsch,MLN 27, 168 = DCECH 1, 313-314), agal./aport arvol (1209 [arvoles pl. (irrégulier)], DELP3 ; DDGM ; CunhaÍndice ; Houaiss).

II. Genre masculin innovant

II.1. Sens « arbre »

II.1.a. Type originel (sans dissimilation)
*/ˈarbor‑e/ > dacoroum. arbure s.m. « arbre » (dp. 1500/1510, Psalt. Hur.2 1, 87 ; Tiktin3 s.v. arbore ; EWRS s.v. arbor(e) ; Candrea-Densusianu n° 74 ; DA s.v. arbore ; Cioranescu n° 374 ; MDA s.v. arbore)5, istroroum. ˹årbure˺ (MaiorescuIstria 107 ; Byhan,JIRS 6, 297 ; FrăţilăIstroromân 1, 91), méglénoroum. árburi (Candrea,GrS 3, 184 ; CapidanDicţionar s.v. árbur ; AtanasovMeglenoromâna 42, 65, 141, 282 ; PapahagiMeglenoromânii 2, 190), aroum. arbure (Pascu 1, 38 ; DDA2 ; BaraAroumain), istriot. ˹árboro˺ (IveIstria 31, 50 ; DeanovićIstria 27 ; LEI 3, 758-819 ; PellizzerRovigno ; AIS 533 p 397 ; 1251 p 397)6, itsept. ˹árboro˺ (dp. 12e s. [avén. arbor], Coluccia in TLIO s.v. albero ; LEI 3, 760-776 ; DELI2 s.v. albero ; AIS 533, 1251)7, fr. arbre (dp. 1100, RolS2 294 = FEW 25, 88a ; GdfC ; TLF ; TL ; AND2 ; ALF 51, 52), frpr. ˹arbro˺ (dp. 13e s., HafnerGrundzüge 83 ; Aebischer/Jeanjaquet in GPSR 1, 569-574 ; ALF 51, 52), occit. ˹arbre˺ (dp. ca 1230, DAO n° 449 ; Raynouard ; AppelChrestomathie ; FEW 25, 88a ; Pansier 5 ; ALF 51, 52), gasc. ˹arbe˺ (dp. 1260, DAG n° 449 ; Palay s.v. ârbe ; CorominesAran 279 ; ALF 51, 52 ; ALG 88), cat. arbre (dp. 13e s., DECat 1, 360-361 ; MollSuplement n° 267 ; DCVB ; ALPI 17), aesp. arbor (ca 1150 – 1599 [arbor], CORDE ; Kasten/Cody ; Kasten/Nitti ; NTLE), ast. árbore (dp. 13e s. [arvore], DELLAMs ; DGLA)8.

II.1.b. Type dissimilé */-r-r-/ > */-l-r-/
*/ˈalbor‑e/ > it. albore s.m. « arbre » (dp. av. 1249 [atosc.], LEI 3, 760 ; DELI2 s.v. albero ; Coluccia in TLIO s.v. albero)9, lad. àlber (AIS 1251 p 313 ; TagliaviniSaggio 125 ; Salvioni,ID 14, 83 ; ElwertFassa 306), afr. aubre (mil. 13e s. – 1307, GdfC ; FEW 25, 88a), occit. ˹albre˺ (av. 1126 – 1563, DAO n° 449 ; Raynouard s.v. arbre ; AppelChrestomathie ; FEW 25, 88a ; Pansier 5 ; BrunelChartes ; BrunelChartesSuppl), gasc. ˹albre˺ (1273 – 1492, DAG n° 449 ; Palay s.v. ârbe [aubre] ; ALF 51, 52 ; ALG 88), cat. albre (dp. 1409, DCVB ; DECat 1, 360-361 ; MollSuplement n° 267 ; ALPI 17).

II.1.c. Type dissimilé */-r-r-/ > */-r-l-/
*/ˈarbol‑e/ > végl. ˹juárbul˺ s.m. « arbre » (BartoliDalmatico 233 § 39, 239 § 43, 268 § 79, 276 § 87, 288 § 115 [járbur] ; ElmendorfVeglia s.v. juarbol [fausse lemmatisation] ; MihăescuRomanité 115)10, it. arbole (dp. fin 14e s. [atosc.], LEI 3, 782), frioul. arbul (Zamboni in DESF ; AIS 533, 1251 ; ASLEF 760 n° 3615), esp. árbol (dp. 1196 [arbol], CORDE ; DCECH 1, 313-314 ; Kasten/Cody ; Kasten/Nitti ; DME ; NTLE ; ALPI 17), ast. árbol (dp. 1221 [aruol], DELLAMs ; DGLA ; ALPI 17).

II.2. Sens « mât »

II.2.a. Type originel (sans dissimilation)
*/ˈarbor‑e/ > istriot. árboro s.m. « espar planté sur le pont ou dans la quille d’un navire, mât » (DallaZoncaDignanese ; ILA n° 2077)1112, fr. arbre m. (dp. 13e s., FEW 25, 88b ; GdfC ; TLF ; TL), cat. arbre (dp. 13e s., DECat 1, 360-361 ; DCVB), aesp. arbor (NTLE)13.

II.2.b. Type dissimilé */-r-r-/ > */-l-r-/
*/ˈalbor‑e/ > istriot. álbaro s.m. « mât » (DeanovićIstria 99 ; ILA n° 2077), it. albore (dp. 1292 [atosc. àlbero], Coluccia in TLIO s.v. albero ; LEI 3, 790 ; DELI2 s.v. albero), romanch. alber/arver (Pult in DRG 1, 165 ; cf. EichenhoferLautlehre § 500b), afr. aubre (1420, GdfC)14, occit. ˹albre˺ (13e – 14e s., Raynouard s.v. arbre ; FEW 25, 88b ; Pansier 5).

II.2.c. Type dissimilé */-r-r-/ > */-r-l-/
*/ˈarbol‑e/ > végl. ˹juárbul˺ s.m. « mât » (BartoliDalmatisch 2, 31 § 42 [járber pl. ; forme irrégulière]), émil.-romagn. arbol (LEI 3, 799), esp. árbol s.m. « mât » (dp. 15e s., DME ; DCECH 1, 313-314 ; Kasten/Cody ; NTLE).

II.3. Sens « pièce maîtresse »

II.3.a. Type originel (sans dissimilation)
*/ˈarbor‑e/ > it. arbore s.m. « pièce qui sert de support à d’autres pièces animées, pièce maîtresse » (1467 – 1641, LEI 3, 802)15, romanch. arver (Schorta in DRG 1, 436 ; cf. EichenhoferLautlehre § 500b), fr. arbre (dp. 1100/1150, TLF ; GdfC ; FEW 25, 88b ; TL ; ALCB 269 ; ALB 293 ; ALN 51, 262 ; ALPic 108), frpr. ˹arbro˺ (dp. 15e s., HafnerGrundzüge 83 ; Aebischer/Jeanjaquet in GPSR 1, 569-574), cat. arbre (DCVB).

II.3.b. Type dissimilé */-r-r-/ > */-l-r-/
*/ˈalbor‑e/ > it. albore s.m. « pièce maîtresse » (dp. 1620 [alboro], LEI 3, 802-804 ; DELI2), romanch. alber (Pult in DRG 1, 165), occit. orient. ˹albre˺ (FEW 25, 88b).

II.3.c. Type dissimilé */-r-r-/ > */-r-l-/
*/ˈarbol‑e/ > gasc. arplou s.m. « pièce maîtresse » (FoixGascon), esp. árbol (NTLE), ast. árbol (DELLAMs ; DGLA).

Commentaire. – Tous les parlers romans sans exception présentent des cognats conduisant à reconstruire soit directement, soit à travers des types phonologiquement et/ou morphologiquement évolués, protorom. */ˈarbor‑e/ s.f. « plante de tronc ligneux qui se ramifie à une certaine hauteur du sol, arbre ; espar planté sur le pont ou dans la quille d’un navire, mât ; pièce qui sert de support à d’autres pièces animées, pièce maîtresse ».
Les cognats romans ont été subdivisés ci-dessus, en premier lieu, selon les deux genres qu’ils manifestent : féminin (I.) et masculin (II.). Le féminin est aujourd’hui essentiellement caractéristique d’une aire isolée (sard.) et d’une aire latérale (gal./port.), mais il existe aussi des vestiges d’une plus grande extension à des époques plus anciennes (it. oïl. esp.), tandis que le masculin occupe l’ensemble de la Romania à part le sarde et le galégo-portugais. Cette distribution spatiale permet d’affirmer le caractère primaire de la couche avec genre féminin et d’attribuer la formation du masculin au protoroman continental, daté entre l’individuation du protosarde (2e m. 2e s. [?], cf. Straka,RLiR 20, 256) et celle du protoroumain (3e s., cf. RosettiIstoria 184 ; Straka,RLiR 20, 258). En réalité, le genre féminin de */ˈarbor‑e/ constituait une anomalie au sein du système morphologique protoroman (Ernout/Meillet4 s.v. arbōs : “seul féminin de ce type”), qui s’expliquait probablement par une vision animiste de la nature (idée de la terre nourricière) et l’association de la production fruitière avec l’activité reproductrice féminine (plutôt que par des raisons mythologiques comme le suggère LausbergLinguistica 2, § 601). Cette anomalie a été réparée par le dégagement du masculin (type II.), par analogie à la fois avec les substantifs de la série en */‑ˈor‑e/ (type */kaˈl‑or‑e/ s.m.) et avec les noms d’arbres passés au masculin comme */ˈɸraksin‑u/ (cf. Ernout/Meillet4 ; MeyerLübkeGLR 2, § 362, 371 ; RohlfsGrammStor 2, § 382).
La structure hiérarchise ensuite les cognats selon les trois valeurs sémantiques qui leur sont attachées : « arbre » (I.1. ; II.1.), « mât » (II.2.) et « pièce maîtresse » (II.3.). Par sa large distribution – il est panroman sauf romanche – et le fait que le féminin n’en connaisse pas d’autre, le sens « arbre » se dénonce comme originel : c’est le seul qu’il soit possible de reconstruire pour le protoroman stricto sensu. Le sens « mât » est bien documenté tout au long des côtes adriatique et méditerranéenne (végl. istriot. it. [romanch. fr.] occit. cat. esp.). Comme le sarde ne le connaît pas, son apparition ne peut pas être datée avant la séparation du protosarde du protoroman continental (2e m. 2e s. [?], cf. Straka,RLiR 20, 256)16. Quant au sens « pièce maîtresse », il est attesté dans une vaste aire de la Romania ‛italo-occidentale’ (it. romanch. fr. frpr. occit. gasc. cat. esp. ast.), ce qui assigne son apparition à une date postérieure au dégagement du protoroumain (2e moitié ou fin 3e ; RosettiIstoria 184 ; Straka,RLiR 20, 258).
En dernier lieu, la structure met en évidence un critère phonologique, à savoir le traitement des deux vibrantes */-r-r-/ : maintien (I.1.a., II.1.a., II.2.a., II.3.a.), dissimilation régressive (*/-l-r-/ ; I.1.b., II.1.b., II.2.b., II.3.b.) ou dissimilation progressive (*/-r-l-/ ; I.1.c., II.1.c., II.2.c., II.3.c.). Les cognats présentant une dissimilation sont très répandus, et même si on peut se poser la question de savoir s’il s’agit de processus protoromans ou de développements idioromans dans un même contexte phonétique, il semble difficile de ne pas suivre MeyerLübkeEinführung 176-177 pour y voir une origine commune. En effet, les types */ˈalbor‑e/ (sard. istriot. it. lad. romanch. fr. occit. gasc. gasc.) et */ˈarbol‑e/ (végl. it. frioul. gasc. esp. ast. port.) ne donnent pas l’impression de phénomènes sporadiques, puisqu’ils forment des aires compactes. L’approche géolinguistique permet d’affirmer le caractère primaire du type */ˈarbor‑e/ et de constater l’ancienneté des formes dissimilées. En effet, la branche roumaine (aire latérale archaïque) et le francoprovençal (qui peut être considéré comme une aire isolée) ne connaissent que le type */ˈˈarbor‑e/, qui est également attesté en sarde. Pour ce qui est du type */ˈalbor‑e/, son aire est quasiment entièrement (à part le ladin) incluse dans celle du type */ˈarbor‑e/. Enfin, la plupart des idiomes qui présentent le type */ˈarbol‑e/ (à part le végliote et le frioulan) connaissent ou ont connu aussi le type non dissimilé (it. gasc. esp. ast. port.). En conséquence, puisque */ˈarbor‑e/ est caractéristique d’une aire latérale et d’une aire isolée et que presque tous les domaines où */ˈalbor‑e/ et */ˈarbol‑e/ sont attestés connaissent aussi */ˈarbor‑e/, */ˈarbor‑e/ est à considérer comme un archaïsme et les deux types dissimilés comme des innovations qui n’ont pas réussi à triompher complètement.
Le scénario historique reconstruit sur la base de la reconstruction comparative ne trouve que très partiellement un pendant dans la langue écrite. Le corrélat du latin écrit du type I., arbor, -is s.f., est usuel durant toute l’Antiquité dans les sens « arbre » (dp. Plaute [* ca 254 – † 184], IEEDLatin ; cf. TLL 2, 419-427) et « arbre du pressoir » (dp. Caton [* 234 – † 149], TLL 2, 427) et attesté depuis Virgile (* 70 – † 19) dans les sens « mât » et « poutre » (tous les deux TLL 2, 427). Le corrélat du type II., arbor s.m. « arbre », est attesté à partir de la Vetus Latina (Ernout/Meillet4 s.v. arbōs). Enfin, le type dissimilé albor n’est attesté que chez Corippe (6e s., MeyerLübkeEinführung 176-177).
Du point de vue diasystémique (latin global), on peut observer que le genre masculin de */ˈarbor‑e/ ~ arbor et ses variantes dissimilées relèvent de variétés diastratiquement et/ou diaphasiquement marquées qui n’ont pas eu, ou n’ont eu que très tardivement, accès à l’écrit.

Bibliographie. – MeyerLübkeGLR 1, § 222, 306-307, 325, 474-475 ; 2, § 374 ; GrammontDissimilation 22-23 ; REW3 s.v. arbor ; Ernout/Meillet4 s.v. arbōs ; PosnerDissimilation ; RohlfsGrammStor 1, § 262, 328 ; von Wartburg 1970 in FEW 25, 88a-90b, arbor ; Calabrò/Fanciullo/Lupis 1988 in LEI 3, 758-819, arbor ; LausbergLingüística 1, § 173-5, 284-291, 364-366, 409 ; 2, § 601, 604 ; DardelGenre 39 ; HallPhonology 50 ; Faré n° 606 ; SalaVocabularul 539 ; DOLR 5 (1994), 91-93 ; StefenelliSchicksal 106, 224 ; MihăescuRomanité 193.

Signatures. – Rédaction : Xosé Afonso Álvarez Pérez. – Révision : Reconstruction, synthèse romane et révision générale : Jean-Pierre Chambon. Romania du Sud-Est : Petar Atanasov ; Victor Celac ; Cristina Florescu ; August Kovačec ; Nikola Vuletić. Italoromania : Giorgio Cadorini ; Rosario Coluccia ; Maria Iliescu ; Paul Videsott. Galloromania : Jean-Paul Chauveau. Ibéroromania : Maria Reina Bastardas i Rufat ; Myriam Benarroch ; Ana Boullón ; Ana María Cano González. Révision finale : Éva Buchi. – Contributions ponctuelles : Pârvu Boerescu ; Amélie Daloz ; Jérémie Delorme ; Xosé Lluis García Arias ; Günter Holtus ; Manuela Nevaci ; Jan Reinhardt.

Date de mise en ligne de cet article. – Première version : 16/08/2014. Version actuelle : 08/04/2024.

 


1. En raison de l’ancienneté du type albero dans les textes toscans et de la présence du groupe /-rb-/ (alors qu’on attendrait */-rv-/ en italien centro-méridional), Calabrò/Fanciullo/Lupis in LEI 3, 818 identifient it. arbore (av. ca 1257 – 1877, LEI 3, 759, 808 ; Coluccia in TLIO s.v. albero) comme un latinisme.
2. Von Wartburg in FEW 25, 88a considère que les rares formes féminines rencontrées dans des dialectes français occidentaux et centraux ne sont pas des héritages, mais des retours récents. Il est vrai que les substantifs à voyelle initiale (et surtout en /a-/) sont susceptibles de changer de genre, ce qui pourrait inciter à analyser les féminins modernes comme issus d’une féminisation et les attestations anciennes comme influencées par le genre du lexème latin ou par les fluctuations du genre en anglo-normand tardif. Néanmoins, cela n’expliquerait pas la concordance diatopique entre données anciennes et modernes. En outre, il y a des attestations anciennes (TL ; DMF2010 ; Huguet) dont ne tient pas compte le FEW et dont la dispersion, si elle est plus large que celle des dialectalismes, n’est pas en discordance avec elle, si l’on retient les caractérisations géographiques du DEAF ou le lieu de naissance des auteurs du 16e siècle.
3. En asturien, la survivance du genre féminin est documentée indirectement à travers des toponymes comme Las Arboliel.las (Teberga) ainsi que dans des textes médiévaux du domaine asturien rédigés en latin (942 [ms. 12e s. ; suas arbores] – 1234 [arbores fructuosas], DELLAMs).
4. L’attestation de 984 proposée par DELP3 (> Houaiss) correspond à une source latine.
5. En dacoroumain littéraire, l’issue régulière arbure a été adaptée en arbore (dp. 1780, MicuElementa 92 ; LB ; DA ; Tiktin3, Cioranescu n° 374 ; MDA ; DELR) sous l’influence du latin : dans un premier temps, la graphie latinisante <arbore> devait encore noter la réalisation traditionnelle [ˈarbure], mais petit à petit, la réalisation [ˈarbore] s’est imposée sous l’influence de la graphie (cf. ŞuteuInfluenţa 66, 97, 173).
6. Calabrò/Fanciullo/Lupis in LEI 3, 818 considèrent istriot. ˹arbo˺ (LEI 3, 818 ; PellizzerRovigno ; AIS 533 p 398) comme un héritier probable de la forme du nominatif. Mais la conservation du nominatif serait étrange pour un nom commun qui ne s’applique pas à un être humain (RohlfsGrammStor 2, § 344), de sorte que nous y voyons plutôt une variante ayant subi un accident phonétique (apocope ou dissimilation entre vibrantes).
7. En revanche, romanch. arver s.m. « arbre », attesté une seule fois au 19e siècle (chez Pallioppi), représente un emprunt ponctuel à l’italien (cf. Pult in DRG 1, 165), contrairement aux cognats héréditaires classées sous II.2.2. et II.3.1.
8. Le masculin connaît une grande vitalité en galicien moderne et contemporain ; comme la documentation est tardive, il semble s’agir d’un castillanisme.
9. Cette issue régulière a été évincée, dans la langue standard contemporaine, par it. albero, dont la forme repose sur un changement idioroman sur le modèle de la deuxième déclinaison latine, qui traduit mieux le genre masculin du substantif. Elle a subi aussi une modification de la voyelle de la syllabe médiane (LausbergLingüística 1, § 290, 293 ; 2, § 624), cf. la variante plus étymologique àlboro (dp. 1374, DELI2).
10. Le vocalisme tonique de cette forme manifeste une influence croate.
11. Istroroum. (Jeian) hárbur s.m. « mât » (PuşcariuIstroromâne 3, 101) constitue un calque sémantique ponctuel à partir d’it. albero ou de cr. jarbol (< dalm./it./frioul., Skok 1, 56) : le village de Jeian, situé sur un plateau à presque 700 mètres d’altitude, ne connaît pas de terminologie maritime héréditaire. Pour ce qui est d’istroroum. (Suşneviţa) i̯årbulu s.m. « mât » (PuşcariuIstroromâne 3, 101), son initiale le dénonce comme un emprunt à cr. jarbol.
12. Nous écartons, en raison de son isolement et du caractère idiosynchrasique, susceptible de contenir des latinismes, du texte qui l’atteste, ait arbore s.f. (1309 [atosc. ; deux attestations], GiordPisaIannella 19 = Coluccia in TLIO s.v. albero), .
13. Le portugais connaît un vestige du sens « mât » dans le syntagme árvore seca « épars d’un navire où toutes les voiles sont attachées » (2e m. 15e s. – 1712/1728, PicoTerminologia 251 ; HouaissGrande ; Bluteau).
14. Le caractère indigène de cette attestation n’est pas assuré : elle provient d’un texte écrit par un Gascon, parsemé de gasconismes. Dans l’édition d’un autre extrait du même manuscrit (RickardChrestomathie 71-73), on trouve à plusieurs reprises la variante albre.
15. Nous proposons le sens « pièce maîtresse (qui sert de support à d’autres pièces animées) » pour regrouper de façon synthétique et étymologisante des sens spéciaux comme « bâton du pressoir », « arbre d’un moulin » ou encore « axe de la charrue ».
16. Que l’apparition du sens « mât » de protorom. */ˈarbor‑e/ ait pu être favorisée, comme le propose Skok 1, 56 s.v. arbor, par l’homonymie de protorom. */ˈmal‑u/2 « mât » (cf. von Wartburg 1958 in FEW 6/1, 123b, mālus ; lat. malus s.m. « id. » dp. Plaute, IEEDLatin) avec */ˈmal‑u/1 adj. « mauvais » (cf. REW3 s.v. malus ; lat. malus adj. « id. » dp. Livius Andronicus, IEEDLatin) nous paraît très peu probable étant donné que ces lexèmes appartiennent à deux catégories grammaticales différentes.

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