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AMULER
1331-1500
lexie, définition
Source première :
 La Curne
amuler (s'), verbe
« s'abrutir »
 

… Par convoitise s'amule : Pluseurs laissent la droite rule (Eust. Desch. Poës. MSS. p. 223, col. 1) Rem. : La Curne accompagne la glose « s'abrutir » du commentaire suivant : "Proprement, fieri sicut mulus".
REM : La Curne cite le ms. BnF fr. 840 (anc. 7219) par le biais de la copie Ars. 3291-3293, faite pour lui.

Source(s) secondaire(s) :
Source secondaire :
 Gdf 1, 281b
amuler (s'), v. réfl.
« s'abrutir »
 

Que vault, ne braire, ne hurler ? Au negligent qui brait, hurle : On le devroit anuler Quant par convoitise s'amule (Eust. Desch. Poés., Richel. 840, f° 223a)

Source secondaire :
 SchelerGil 10
amuler, verbe
« litt. mettre en meules, entasser, fig. amasser, multiplier »
 

Godefroy donne notre verbe au réfléchi, mais il se méprend en traduisant s'amuler par « s'abrutir » au lieu de « s'enrichir » dans ce vers d'Eust. Deschamps : « Quant par convoitise s'amule ». — Pour la dérivation du sens, cp. pl. h. amasser.

Justification :
 mélecture liée à une erreur sur le nombre de jambages
3e tiers du 14e siècle
manuscrit   BnF fr. 840, f° 223a : anule ou avule.

À la suite de La Curne, Gdf 1, 281b enregistre une attestation unique du verbe réfléchi s'amuler « s'abrutir », empruntée à Eustache Deschamps, relevée dans le ms. BnF fr. 840 (ca 1400) sur lequel se sont fondés le Marquis de Queux de Saint-Hilaire et G. Raynaud pour l'édition des Oeuvres complètes de Eustache Deschamps, parue à Paris de 1878-1903. Au passage correspondant de la balade qui commence par « On dit qu'il fault dissimuler », l'édition DeschQ donne : Que vault ne braire ne huler Au negligent qui brait et hule ? On le devroit bien anuler Quant par convoitise s'anule (DeschQ 5, 39, 20). Or, le DMF 2015 annuler propose : II. - Empl. pronom. "Devenir nul, disparaître" : Après tu ne fais chose nulle Dont joie en ton cuer tant s'anulle, Ne dont tu aies tant d'irour, Comme de vivre en telle errour Que tu tiens ta dame pour fole (MACH., R. Fort., c.1341, 65). Rem. Sans doute faut-il lire s'avule ("s'aveugle") ds l'ex. suiv. : Que vault ne braire ne huler Au negligent qui brait et hule ? On le devroit bien anuler Quant par convoitise s'anule (DESCH., Oeuvres Q., t.5, c.1370-1407, 39). En effet, le manuscrit BnF fr. 840, f° 223a (visible sur Gallica) se lit plutôt anule, mais une lecture avule n'est pas impossible. Il se trouve que l'exemple de DeschQ manque dans DMF : aveugler, où manque aussi la graphie banale avule. Par contre, le DMF recense : C. 3. S'aveugler. "Entraver soi-même le libre exercice de ses facultés ; se leurrer, se faire illusion" : Car Dieu sa grace aucune fois decline De l'omme qui s'aveugle en luxure (BAUDOUIN, Instruct. vie mortelle B., c.1431-1439, vers 4883). Or prennent ilz a coup auctorité usurpee et puissance non deue, et se aveuglent en la vanité de leur fortune (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 47) (DMF : aveugler). En conclusion, Gilles Roques serait enclin à lire s'avule dans DeschQ et à suivre l'interprétation du DMF, qui signale opportunément s'aveugler au sens de « entraver soi-même le libre exercice de ses facultés ; se leurrer, se faire illusion », à partir de deux exemples du 15e siècle extraits de ChartEspR et Baudouin, Instruct. vie mortelle B. Par conséquent, il conviendrait de supprimer le fantôme amuler (s') « s'abrutir » du « Godefroy » et d'ajouter la citation corrigée de s'avuler « entraver soi-même le libre exercice de ses facultés ; se leurrer, se faire illusion », empruntée à Eustache Deschamps, à GdfC, aveugler ainsi qu'au DMF : aveugler (C. 3.). Notons en outre l'intérêt lexicographique de cette attestation du 14e siècle de s'avuler en face de s'aveugler « perdre l'usage de sa raison » "1640, Corneille" dans FEW 24, 36a. Pour finir, nous signalons que l'insolite s'amuler cité par Gdf a été repris par Auguste Scheler dans son Étude lexicologique sur les poésies de Gillon le Muisit. Celui-ci a soutenu qu'il faut comprendre « s'enrichir », en établissant un parallèle entre les développements sémantiques d'amuler, littéralement « mettre en meules, entasser », figurément « amasser, multiplier » et amasser « entasser, s'enrichir » (SchelerGil 10).

Solution :
 AVULE (s') « entraver soi-même le libre exercice de ses facultés ; se leurrer, se faire illusion »
FEW 24, 36a aboculis
Correction des sources :
 Source à corriger :
  suppression de l'article
Gdf 1, 281b
amuler (s'), v. réfl.
« s'abrutir »
Rem. : Il conviendrait de supprimer l'entrée amuler (s') « s'abrutir » du « Godefroy » et d'ajouter la citation corrigée de s'avuler « entraver soi-même le libre exercice de ses facultés ; se leurrer, se faire illusion », empruntée à Eustache Deschamps, à GdfC, aveugler ainsi qu'au DMF : aveugler (C. 3.), au FEW 24, 36a, ab oculis et enfin au TL, avogler.
  

2016 : G. Roques ; N. Steinfeld, T. Matsumura, M. Plouzeau


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