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MIRER
900-1330
lemmatisation, définition
Source première :
 Gdf 5, 341b
mirer1
« v. réfl. prendre soin de sa personne »
 

Or vos ai dit de sa maniere, Com faitement elle se mire (G. Le Long, la Veuve, v. 147, Scheler, Trouv. belg., 230)

Source(s) secondaire(s) :
Source secondaire :
 
medicus - mirie - mirer
 

Afr. mirer v. a. « soigner, guérir » StRemi, mfr. id. (1454 ; 1537) ; se mirer v. r. « prendre soin de sa personne » GLeu

Justification :
 interprétations erronées ayant entraîné de mauvaises étymologisations
13e siècle

FEW 6/1, 604b, medicus, enregistre une attestation du verbe mirer « soigner, guérir », relevée dans la Vie de saint Remi par Richier, éditée par W. N. Bolderston. Dans le glossaire, on trouve " Mirer 2470, guérir " et on lit au vers indiqué : Si ai grant mestier de bon mire. Sains Remis dist : Dieus le vous mire (SRemiB 2470). Il s'agit de la formule de souhait bien connue en ancien et moyen français Dieus le vous mire « que Dieu vous en récompense !, Dieu vous le rende ! » (Gdf : merir ; TL : merir ; AND2 : merir ; DÉCT : merir ; DMF : merir), où mire représente le subjonctif présent (3e pers. sing.) du verbe merir « récompenser ; donner une compensation à aucun pour aucune chose » (FEW 6/2, 29a, merere). Quant à l'attestation de se mirer v. r. « prendre soin de sa personne », tirée de Ch. H. Livingston, Le jongleur Gautier le Leu, Étude sur les fabliaux [GautLeuL2 A 148], elle est déjà citée par Gdf 5, 341b d'après l'édition d'Auguste Scheler, qui retranscrit le ms. de Turin [T, wall. ca 1300] : La dame n'a mais de mort cure, ains soi reblanchoie et rescure Et fait janir ses molekins Et redrece ses raverquins […] Et veste reube à remuyers. Ausi con uns ostoirs muiers, Ki se va par l'air enbatant, Se va la dame deportant, Mostrant son cors de rue en rue […]. Or vos ai dit de sa maniere, Confaitement elle se mire [var. D : s'atire] (TrouvBelg1, pp. 229-230, vers 127-148 ; cf. MontRayn 2, 339, var. 148). Dans le fabliau de La veuve, Gautier Le Leu traite du sujet de la veuve pressée de se remarier après la mort de son mari. Il peint avec humour le désespoir de la veuve qui ne veut pas survivre à son époux chéri, l'indignation au premier mot qu'on lui dit d'un second mariage, l'insensible adoucissement du deuil, la renaissance du sourire et de la coquetterie, l'impatience du veuvage. Il nous semble que la jeune veuve se regarde attentivement dans le miroir (se mire), soucieuse de mettre en valeur son apparence physique et ses attitudes, dans le but de séduire les hommes par une mine soignée, une toilette recherchée et toutes sortes de petits manèges de femmes coquettes (air, pose, regard, sourire, geste, paroles). La variante s'atire « s'habille, s'équipe » du ms. Paris BnF fr. 2168 (D, pic. fin 13e s.) conforte notre interprétation, qui était déjà celle d'Auguste Scheler, laquelle a été reprise sous une forme abrégée sans son sème « se regarder » par Godefroy et Livingston : Se mirer, se regarder, ici = prendre soin de sa personne, pour paraître sous les aspects les plus avantageux (TrouvBelg1, Notes explicatives, p. 341, v. 148). Quant à Baldinger, il a probablement compris que prendre soin de sa personne signifiait « s'occuper de sa santé », d'où le rattachement étymologique de se mirer à la famille de medicus « médecin » (FEW 6/1, 604b). Cependant, il se trouve que le verbe mirer « soigner, guérir » est attesté continuement du 13e au 16e siècle, ce qui inciterait à penser que le texte donne peut-être à entendre que notre jeune veuve s'emploie à guérir de sa profonde tristesse, qu'elle fait ce qu'il faut pour se soulager de son immense chagrin (cf. AND2 : mirer2, DEAFpré : lemme mire ; DMF : mirer2 ; Gdf : mirer2).

Solution :
 se MIRER, DIEUS LE VOUS MIRE ! ; lemme : MIRER, MERIR ; « se regarder attentivement dans un miroir » — « que Dieu vous en récompense ! »
FEW 6/2, 148b mirari I 1 || FEW 6/2, 29a merere I
Correction des sources :
 Source à corriger :
  correction
Gdf 5, 341b
mirer1
« v. réfl. prendre soin de sa personne »
Rem. : Il conviendrait de supprimer dans l'article mirer1 de Gdf 5, 341b, l'extrapolation « prendre soin de sa personne » empruntée à TrouvBelg1 et d'ajouter la citation du fabliau de La veuve de Gautier Le Leu sous la subdivision introduite par " Réfl., se regarder, se contempler ".
  Source à corriger :
  déplacement-S
FEW 6/1, 604b
medicus - mirie - mirer
Rem. : Il conviendrait de biffer les données " Afr. mirer v. a. « soigner, guérir » StRemi " et " se mirer v. r. « prendre soin de sa personne » GLeu " du FEW 6/1, 604b, medicus. En effet, afr. Dieus le vous mire ! « que Dieu vous en récompense ! » (StRemi) serait à classer dans le FEW 6/2, 29a, merere, qui atteste cette formule de souhait depuis Wace. Il faudrait ranger l'exemple de se mirer de GLeu dans le FEW 6/2, 148b, mirari, qui fait remonter le sens « se regarder (dans une glace, etc.) » à Chrestien de Troyes. En outre, les cinq exemples de mirer v. a. « soigner, guérir » cités par l'AND2 : mirer2 (2e q. 13e s.), le DEAFpré : lemme mire (GeoffrParChronD 3084) et le DMF : mirer2 (1415 ; ca 1450 ; a. 1482) permettent d'enrichir le FEW 6/1, 604b, qui relève ce sens seulement en 1454 et 1537 (cf. Gdf, mirer2 ; Du Cange, miro2). En passant, nous signalons qu'il faudrait supprimer du DEAFpré (lemme mire), article mirer v. tr. « soigner, guérir » ; v. pron. à valeur réfléchie « prendre soin de sa personne », les attestations de SRemiB 2470 et GautLeuL2 A 148 incriminées ci-dessus. GautLeuL2 avec un point d'interrogation à la place de la définition est recensé aussi sous le lemme mirer « (se) regarder ».
  

2017 : G. Roques ; N. Steinfeld, T. Matsumura


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