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funiculaire, adj. et subst.

Étymologie
Histoire :
B. 2. a — Adj. et subst. (mécanique) courbe funiculaire « courbe formée par une corde flexible, dont les extrémités tiennent à deux points fixes, et qui est soumise à certaines forces ». Attesté depuis 1697 [lettre de Bernoulli à Varignon du 15 octobre] (Le Journal des Sçavans, page 464 : une méthode […] de trouver la courbe funiculaire ou de la chainete par la considération de maximis & minimis, en ne faisant reflexion que sur ce que le centre de gravité de la chaîne doit descendre le plus bas qu’il est possible. — Subst. une funiculaire, attesté depuis 1697 [lettre de Bernoulli à l'Auteur], Basnage de Beauval, Histoire, juin 1697, page 460 : (en parlant du Marquis de l'Hospital) sa methode est fondée sur mes principes que je lui avois communiquez autrefois pour la recherche generale des funiculaires, ou des Courbes des chainettes, lors qu’on considere les cordes ou les chaines d’une pesanteur non‑uniforme). - 
A. 0. — Adj. (physique) « qui présuppose l'existence d'une espèce de petits cordons (funiculi) ». Attesté depuis 1721 (Trévoux3, s.v. Funiculaire, adj. Terme de Physique. Funicularis. Le systême funiculaire, l’hypothêse funiculaire, c’est un systême inventé par François Linus pour expliquer les effets que l’on attribuë communément à la pesanteur de l’air. Il suppôse que ce qui soutient le mèrcure dans l’expérience de Torricel n’est point le poids de l’atmosphère qui presse le mèrcure qui est dans le bassin ; mais une éspéce de petit cordon d’une matière très fine et très‑subtile, laquelle étant éxcéssivement raréfiée par une tension violente, fait continuellement éffort pour se ressèrrer elle‑même, ou devenant moins raréfiée conformément à la différente température de l’air éxtérieur, par ces deux moyens caûse l’élévation ou la descente du vif argent dans le tube. Harris. Ce mot vient de funiculus, cordon). - 
A. 1. — Adj. (mécanique) « fait de cordes ». Attesté depuis 1725 (Varignon, Nouvelle mécanique, tome 1, page 1 : La Mécanique […] est aussi la Science des proprietez et des usages des Machines ou Instrumens propres à faciliter le Mouvement. Entre ces Machines on en compte d’ordinaire six élementaires après Pappus (Liv. 8.) lequel pourtant n’en compte que cinq, quoiqu’il en employe six ; sçavoir, le Levier, le Tour, la Poulie, le Plan incliné, la Vis, et le Coin ; ausquelles on en peut encore ajoûter une, que j’appelle Funiculaire, en ce qu’elle n’est faite que de cordes propres à soutenir des poids sans le secours d’aucune autre Machine, et en ce qu’elle est aussi indépendante de celles‑là, qu’elles le sont entr’elles). Cf. aussi HistAcSc 1732, page 127 : Aussi M. Varignon traite‑t‑il toutes les Machines indépendamment les unes des autres, la Machine qu’il appelle funiculaire, et qu’il a traitée le premier, […] ; Encyclopédie, volume 7, 1757, page 376a : funiculaire, adj. (Méchan.) on appelle machine funiculaire, un assemblage de cordes, par le moyen desquelles deux ou plusieurs puissances soûtiennent un ou plusieurs poids ; Bossut, Cours, 1786, tome III : Méchanique, page 113 : On appelle machine funiculaire, celle où l’on n'emploie que des cordes pour soutenir un poids, ou pour contrebalancer plusieurs puissances ; Prony, Architecture, 1790, pages 99‑100 : [Les machines mécaniques] sont en général les instruments qu’emploient les hommes pour appliquer les moteurs d’une maniere plus commode et plus avantageuse à faire équilibre à des résistances, ou à les surmonter. […] Les machines qui ne sont que de simple commodité, c’est‑à‑dire qui n’ajoutent rien à l’énergie du moteur, peuvent se réduire à ce qu’on nomme la machine funiculaire, qui consiste en un systême de cordes fixées à un point, ou attachées à un corps, et tendues par des moteurs ou des résistances. En effet, abstraction faite de certaines circonstances physiques, telle que la roideur des cordes, etc., l’emploi de cette machine est le même, pour l’effet, que si les moteurs et les résistances étoient immédiatement appliqués au point ou au corps sur lequel ils agissent par l’intermede des cordes. - 
B. 2. b — Adj. (mécanique) polygone funiculaire « système de points reliés les uns aux autres par des cordes flexibles et inextensibles, chaque point étant soumis à une force égale ». Attesté depuis 1725 (Varignon, Nouvelle mécanique, page 204 : Si presentement on suppose que le précedent polygone funiculaire devienne infinitilatere, […]). Cf. aussi Camus, Cours, 1752, page 51 : Donc il suffit de connoître les directions de tous les cordons du système funiculaire, pour avoir la direction NT de la résultante des puissances P, Q, R, ou la direction TN de la force résultante des tensions de tous les cordons du polygone funiculaire : […]. - 
B. 1. — Adj. (anatomie) « qui se rapporte à un cordon ». Attesté depuis 1834 (Verpillat, Considérations, page 12 : l’artère funiculaire fournie par l’épigastrique, et qui traverse la paroi postérieure du canal inguinal pour se rendre au cordon [sc. spermatique]). - 
A. 2. — Adj. et subst. (chemin de fer) « qui est mis en mouvement par un ensemble de cordes ou de câbles ». Attesté depuis 1840 (Bulletin de Saint-Étienne, tome 17, page 37 [dans l'article "Nouveau systéme de chemins de fer automoteurs", d'Alphonse Peyret‑Lallier] : Les frais d'établissement du système funiculaire). Cf. aussi Perdonnet, Traité, 1860, tome 2, pages 310‑311 : Nous avons déjà eu l’occasion […] d’indiquer que l’usage des machines fixes, comme moteurs sur les chemins de fer, était aujourd’hui assez limité. Ces machines transmettent le mouvement aux convois soit au moyen de cordages, soit à l’aide d’un piston glissant dans un tube établi au milieu de la voie tout au long du chemin. Le premier mode de traction prend le nom de système funiculaire, le second celui de système atmosphérique ; Annales industrielles, premier volume, année 1869, colonnes 33‑34 : L’idée de ce système de traction n’est assurément pas nouvelle. Avant l’application des locomotives aux fortes rampes, on employait des moteurs funiculaires à Londres, Liverpool et Glasgow, en Angleterre ; à Liége, en Belgique ; sur les chemins de fer à Saint‑Étienne, d’Épinac et de Lyon à la Croix‑Rousse, en France, etc. Un seul câble servait à la fois pour retenir le convoi sur le plan incliné et pour lui communiquer un mouvement ascensionnel. La première de ces fonctions exigeait, pour la sécurité, que la solidité du câble et, par conséquent, son poids fussent considérables. La seconde, au contraire, s’accomodait mal de ces proportions massives dont la conséquence inévitable était une grande résistance du câble au mouvement de translation. Cet antagonisme de deux fonctions simultanément imposées à un même engin rendait indispensable un perfectionnement du moteur funiculaire. M. Agudio, ingénieur civil, s’est occupé de la question avec un plein succès. Deux câbles distincts sont substitués au câble unique ; RevSuisseCath, huitième année, n° 6, 10 avril 1877, page 355, Notes d'un pèlerin à Fourvières, Paray et Paris : Tel est le chemin du rosaire, qu'une multitude de personnes pieuses suit chaque jour, le chapelet à la main. Bientôt les voies de locomotion seront complétées par un chemin de fer funiculaire, tel qu’on vient d'en établir un entre Lausanne et Ouchy, et qu'il en existe déjà à Lyon pour monter à la Croix‑Rousse, où on l'appelle le chemin de fer de la ficelle. Deux wagons rattachés par un même câble sont aux extrémités de la ligne. Ce câble est enroulé plusieurs fois autour d'une poulie qui tourne sur elle‑même par l'effet d'un puissant moteur ; cf. encore : La Nature, dixième année, premier semestre, 1882, page 59 : Les tramways funiculaires de San Francisco […] Le tramway funiculaire emprunte la force motrice d'un câble sans fin installé à demeure dans l'axe de la voie , et qui est maintenu constamment en mouvement sous l’action d’une machine fixe ; Conseil municipal de Paris, Procès-verbaux, année 1884, premier semestre, page 1070 : documents relatifs à la création d’un ascenseur funiculaire à Belleville. — Subst. « moyen de transport mis en mouvement par un ensemble de cordes ou de câbles », attesté depuis 1875, Le chemin de fer volume 2, page 146 : (en parlant du chemin de fer Lausanne‑Ouchy) La sollicitude de la Compagnie se porte, paraît‑il, avec une sensible préférence sur son nouveau‑né, le funiculaire. - 

Origine :
B. 2. a Transfert linguistique : emprunt au latin scientifique funicularis adj. et subst., l’expression curva funicularis et le substantif funicularis apparaissant tous les deux dans le latin scientifique de la fin du 17e siècle ; cf. Acta eruditorum 1697, page 217: Quod autem in solutione problematis de curva funiculari præstiterunt olim Hugenius, Leibnitius, & Bernoullius, […] ; Acta eruditorum 1692, p. 446 : quod in Catenaria seu funiculari succedere verissimum est. Cf. von Wartburg in FEW 3, 880a, funis II2b.
A. 0. / A. 1. Transfert linguistique : emprunt au latin scientifique funicularis adj., dérivé de funiculus « corde fine, cordon », substantif employé par Francis Line [Franciscus Linus, en latin] dans son Tractatus de corporum inseparabilitate, Londres : Roycroft 1661 où il expose la théorie erronnée bien décrite ci‑dessus par Trévoux3 (1721), cf. page 24 : Subtilis haec substantia se habet per modum Funiculi, quo Argentum in Tubo suspenditur. L’expression hypothesis funicularis apparaît d’abord dans un ouvrage de son adversaire Robert Boyle, Defensio Doctrinae de Elatere et Gravitate Aëris propositae à Dno. Rob. Boyle in Novis ipsius physico-mechanicis Experimentis, adversus Objectiones Francisci Lini. Ubi etiam Objectoris Funicularis Hypothesis examinatur, […] Rotterdam : Leers 1669. — L’adjectif funicularis n’est pas attesté dans le latin de l’Antiquité, ni dans Du Cange, Ramminger, NLW et Hoven2, mais il semble bien établi du moins à partir de la Renaissance avec le sens de « fait de cordes, de cordons » ; cf. Paulus, Opus, (1532), p. 46 : linamentum funiculare ; Sacco, Varietate (1565), p. 41: Alio etiam deceptionis genere ferociora animantia, ut Lupum, et Aprum, sine periculo captare Læumellinates solent, funibus enim hi nostri retia texunt in sacculi formam, ac longitudinem, orique vincula circumponunt, bursamque à facilitate claudendi, atque aperiendi hoc rete vocant, Aptatur huiusmodi bursa funicularis in sylvarum egressibus, […] ; Mateu i Sanç, Tractatus, (1686), p. 395 : Monasterij septa transgressa fuit adhibitis scalis funicularibus. Le sens de l'adjectif varie dans ces exemples : « fait, formé de cordons » chez Paulus, Sacco et Mateu i Sanç, « qui présuppose l'existence de funicoli » chez Boyle. Ces exemples montrent en plus que le sens diminutif de la base s'est déjà évanoui dans l'usage néolatin, puisque certains objets désignés sont évidemment composés plutôt de funes que de funiculi. Cf. von Wartburg in FEW 3, 880a, funis II2b.
B. 2. b Formation française : composé du substantif polygone* et de l'adjectif funiculaire * (cf. ci‑dessus A. 1. / B. 2. a). À ajouter FEW 3, 880a, funis II2b.
B. 1. Transfert linguistique : emprunt au latin scientifique funicularis adj., qu'on relève avec le sens de « qui se rapporte à un cordon » dans le langage médical au début du 19e siècle, cf. Fleischmann, De vitiis, 1810, p. 21 : Hernia funicularis et quidem simplex vel pura, ea est, in qua intestina dilatata vagina funiculi umbilicalis extra abdomen sita sunt. À ajouter FEW 3, 880a, funis II2b.
A. 2. Formations françaises : issu par évolution sémantique de l'adjectif de relation funiculaire, cf. A. 0. / A. 1). La formation du subst. funiculaire « moyen de transport mis en mouvement par un ensemble de cordes ou de câbles » s'est faite par ellipse du syntagme chemin de fer funiculaire. À en croire le témoignage d'un pèlerin, qui rend visite à Notre‑Dame de Fourvières en 1877, les Lyonnais ont très vite baptisé le funiculaire de la rue Terme, inauguré le 3 juin 1862, du nom de « ficelle ». Et en effet, dans La vie parisienne du 4 septembre 1869, on peut lire qu'on monte à la Crois‑Rousse par un chemin de fer presque vertical qu'on appelle la Ficelle (p. 709)1. Par ailleurs, le Larousse1 [1873] (s.v. Lyon, p. 829b), Le Monde illustré du 17 mars 1877 (166) ainsi que les Procès verbaux des séances du Conseil municipal de Lyon (du 4 mai 1880), mentionnent le curieux chemin de fer de la Croix‑Rousse, appelé communément le chemin de fer de la Ficelle. Antérieurement, en 1874, la Revue archéologique évoquait la découverte d'un ossuaire « lorsque, il y a une quinzaine d'années, on exécuta le tunnel du chemin de fer de la Ficelle » (Revue archéologique ou Recueil de documents et de mémoires relatifs à l'étude des monuments, à la numismatique et à la philologie de l'Antiquité et du Moyen-âge, nouvelle série, quinzième année, volume 28, Paris, 1874, p. 63). Ces attestations de 1869‑1880 seraient à verser au DRF, article ficelle I. (Lyon) fam. "chemin de fer à câble ou à crémaillère" (dp. PuitspeluLyon 1894), par méton. de fr. région. ficelle "câble ou système de traction du funiculaire". Cf. von Wartburg in FEW 3, 880a, funis II2b.

 
1   Aimable communication de Pierre Rézeau.


Rédaction TLF 1980 : Équipe diachronique du TLF. - Mise à jour 2022 : Franz Rainer ; Nadine Steinfeld. - Relecture mise à jour 2022 : Pierre Rézeau ; Jean-Loup Ringenbach ; May Plouzeau.


Première mise en ligne : 12 avril 2022. - Dernière révision : 31 mai 2022. - Mise en ligne : 01 juin 2022.

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