C.N.R.S.
 

DÉRom en anglais
 
Dictionnaire Étymologique Roman
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*/ˈakr‑u/ adj. « qui est d’une acidité désagréable au goût ou à l’odorat »

*/ˈakr‑u/ > sard. akru adj. « qui est d’une acidité désagréable au goût ou à l’odorat, aigre » (DES ; PittauDizionario 1 ; AIS 1267), dacoroum. acru (dp. 1551/1553, Tiktin3 ; EWRS ; Candrea-Densusianu n° 13 ; DA ; Cioranescu n° 59 ; MDA ; ALR II/I 29*), méglénoroum. acru (Candrea,GrS 3, 176 ; CapidanDicţionar ; AtanasovMeglenoromâna 42, 76, 165, 185, 198 ; ALR II/I 29*), aroum. acru (Pascu 1, 28 ; DDA2 ; BaraAroumain ; ALR II/I 29*), istriot. agro (PellizzerRovigno), it. acro (dp. 13e s. [agra f.], Artale in TLIO ; LEI 1, 345 ; Faré n° 92 ; DELI2 s.v. agro ; AIS 1267)1, frioul. agri (PironaN2 ; Faré n° 92 ; Zamboni in DESF ; LEI 1, 359 [agro] ; GDBTF), fasc. ˹egher˺ (dp. 1879 [ager], Kramer/Homge in EWD s.v. àje ; AIS 1267 p 313 ; ALD-I 5)2, afr. aire (ca 1225, TL ; GdfC ; FEW 24, 94b ; TLF)3, frpr. ˹éro˺ (dp. 17e s., FEW 24, 95a ; Gauchat/Muret in GPSR 1, 204-205 s.v. aigre ; HafnerGrundzüge 115 ; FEW 24, 95a)4, occit. agre (dp. ca 1180/1200 [« (cœur) dur »], ArnDanT 286 ; Raynouard ; FEW 24, 94b), gasc. agre (dp. 15e s., LespyR ; CorominesAran 265 ; FEW 24, 95a), cat. agre (dp. ca 1284, DCVB ; DECat 1, 74), esp. agro (1ère m. 13e [« amer »] – 17e s., DME ; DHLECasares ; DEM ; DCECH 1, 77 ; Kasten/Cody ; Kasten/Nitti s.v. agrio)5, ast. agru (AriasPropuestes 2, 47 ; DGLA s.v. agriu ; DELLAMs)6, port. agro (dp. 1344, CunhaÍndice ; DELP3 ; Houaiss ; CunhaVocabulário2).

Commentaire. – À l’exception du végliote et du romanche, toutes les branches romanes présentent des cognats conduisant à reconstruire protorom. */ˈakr‑u/ adj. « qui est d’une acidité désagréable au goût ou à l’odorat, aigre »7. Cette répartition spatiale assigne */ˈakr‑u/ à la strate la plus ancienne du protoroman, antérieure au décrochage du sarde (2e moitié du 2e siècle [?], cf. Straka,RLiR 20, 256) et du roumain.
Le corrélat exact du latin écrit, acrus adj. « aigre », n’est attesté que depuis le 4e siècle (Ernout/Meillet4 s.v. ac-)8, tandis que la variante flexionnelle acer est connue durant toute l’Antiquité (dp. Caton l’Ancien [* 234 – † 149], TLL 1, 357). Du point de vue diasystémique (latin global), la comparaison entre la reconstruction comparative et les données du latin écrit conduit donc à considérer */ˈakr‑u/ comme un oralisme, sans doute marqué diaphasiquement et/ou diastratiquement, qui n’a eu que très tardivement accès à l’écrit.

Bibliographie. – MeyerLübkeGRS 1, § 223, 494 ; REW3 s.v. acer/*acrus ; Ernout/Meillet4 s.v. ac- ; LausbergSprachwissenschaft 1, § 173-175, 420 ; von Wartburg 1969 in FEW 24, 94b-99b, acer ; Faré n° 92 ; HallPhonology 101 ; Pfister 1980 in LEI 1, 345-360, acer ; SalaVocabularul 541 ; StefenelliSchicksal 220-221 ; MihăescuRomanité 227.

Signatures. – Rédaction : Christoph Groß. – Révision : Reconstruction, synthèse romane et révision générale : Valentin Tomachpolski ; Rémy Viredaz. Romania du Sud-Est : August Kovačec. Italoromania : Giorgio Cadorini ; Giorgio Marrapodi. Galloromania : Jean-Paul Chauveau. Ibéroromania : Myriam Benarroch ; Ana Boullón ; Ana María Cano González ; André Thibault. Révision finale : Éva Buchi. – Contributions ponctuelles : Petar Atanasov ; Victor Celac ; Francesco Crifò ; Xosé Lluis García Arias ; Günter Holtus ; Simone Pisano ; Jan Reinhardt ; Uwe Schmidt ; Mário Eduardo Viaro.

Date de mise en ligne de cet article. – Première version : 05/01/2015. Version actuelle : 27/06/2023.

 


1. Contrairement à ce que pourrait laisser entendre la formule de DELI2 s.v. acre (“alle forme dotte con -cr- corrispondono quelle pop. con -gr-”), it. acro est bien héréditaire (cf. LEI 1, 359-360). Par ailleurs, cette issue régulière est aujourd’hui rare et littéraire ; elle a été presque complètement évincée par it. agro, forme originaire du nord de l’Italie (cf. LEI 1, 359-360).
2. Les autres idiomes ladins continuent protorom. */ˈakid‑u/ (cf. Kramer/Homge in EWD ; ALD-I 5).
3. Contrairement à ce qui est dit dans FEW 24, 94b-95a, bourg. are « âpre » ne se rattache pas à cette issue de */ˈakr‑u/, mais représente un continuateur de */ˈarid‑u/ (cf. Roques 1986 in FEW 25, 216a, arĭdus I et n. 3). Par ailleurs, cette issue régulière a été évincée par fr. aigre (dp. déb. 12e s. [s.m. « vinaigre »], FEW 24, 95a = TLF), forme semi-savante probablement influencée par le latin des médecins (cf. FEW 24, 99a).
4. Comme en français, c’est une forme semi-savante de type égro (dp. 1220/1230 [aigri f. « (mort) douloureuse »], ProsalegStimm 110 = HafnerGrundzüge 115) qui est dominante en francoprovençal.
5. Cette issue régulière a été évincée par esp. agrio (cf. Malkiel,MélJakobson 1229-1239).
6. Cette issue régulière est fortement concurrencée par ast. agriu (cf. DALlA ; AriasPropuestes 2, 47 ; DGLA s.v. agriu).
7. Parmi les sens mis en exergue par LEI 1, 345 (« pointu, tranchant ; piquant »), aucun n’est reconstructible.
8. Ce type flexionnel innovant est précédé par le type acer, acra, acrum (dp. déb. 1er s. av. J.-Chr., Ernout/Meillet4 s.v. ac-).

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