historique 2011 séminaires

Historique 2011 des séminaires de l’ATILF

Séminaire ATILF

Énonciation et narratologie : la question du savoir et de l’‘omniscience’ du narrateur

Alain Rabatel (Université de Lyon 1)

2 décembre 2011 | 10h30
Nancy | Campus Lettres et Sciences Humaines | Bâtiment A | salle A104

Résumé
La question du savoir des personnages ou du narrateur implique un cadrage préalable sur les instances énonciatives du point de vue (notion qu’on préfère utiliser, plutôt que celle de ‘focalisation’) (1). Ce cadrage permettra de revenir dans un deuxième temps de façon critique sur les thèses essentielles de la narratologie genettienne relativement au savoir : la thèse de l’ominiscience du narrateur et son pendant, avec de celle de la restriction de champ de la focalisation interne et du degré minimal de savoir de la soi-disant focalisation externe (2). Dans un troisième temps, on discutera, à partir de textes, pour voir quand et dans quelle mesure il y a ‘omniscience narratoriale’, ou plutôt supériorité manifeste du savoir du narrateur, tant il est vrai que la question de l’omniscience ne doit pas être posée en termes ontologiques, mais en termes linguistiques (3). Dans les autres cas, on proposera des pistes pour traiter de ces questions en termes de co-énonciation ou, selon les cas, de sur-énonciation et de sous-énonciation (4).

Séminaire ATILF

Universal semantic primes surface in human languages : French and English perspectives

Anna Wierzbicka (Australian National University, Canberra)

7 novembre 2011 | 15h00
Nancy | Campus Lettres et Sciences Humaines | ATILF | Bâtiment CNRS | Salle Paul Imbs

Résumé
The search for conceptual primes in language began in the 17th century with Leibniz. He posited the existence of an alphabetum cogitationum humanarum, an alphabet of human thoughts, which he believed could be discovered by experimental semantic analysis, i.e. by attempting a large number of definitions of ordinary words in order to discover which meanings can be defined without circularity and which cannot. It was a conception closely akin to Descartes’s, Pascal’s and Arnauld’s pursuit of “clear ideas” and indefinable words.
 
After Leibniz’s death the project fell of the linguistic and philosophical agenda, until the second half of the 20th century, when it was taken up again by the Polish semanticist Andrzej Boguslawski. It was subsequently turned into a large-scale research program in the work of linguists in the Natural Semantic Metalanguage paradigm program, initiated in my l972 book Semantic Primitives and later developed jointly with my Australian colleague Cliff Goddard.
 
Leibniz never proposed anything like a complete list of the elements making up the presumed “alphabet of human thoughts”. As of 2010, however, NSM researchers have advanced a complete and testable set of fundamental human concepts that surface in all languages.
 
Thus, this talk will report on the culmination of a long search: the discovery of a set of sixty four elementary meanings common to all languages and presumably innate.
 
Two versions of this set, English and French will be presented in my talk. The potential of this set as a precise tool for investigating meanings and as a common measure for comparing meanings and ideas across languages and cultures will be illustrated with French and English examples.
 
In particular, I will focus on the French words douleur and bonheur and their putative English equivalents pain and happiness. I will also talk about the English cultural keyword empirical and I will show how it differs in meaning from the French word empirique. More broadly, I will discuss the cultural underpinnings of such differences in the meaning of words and the new vistas that the discovery of universal conceptual primes opens for lexicography, language teaching and the scientific investigations of languages, cognition and culture.

Séminaire ATILF

Modalisateurs à effets dialogiques – polyphoniques

Laurent Perrin (Université Paul Verlaine – Metz)

14 octobre 2011 | 10h30
Nancy | Campus Lettres et Sciences Humaines | ATILF | Bâtiment CNRS | Salle Paul Imbs

Résumé
Cette présentation a deux objectifs. Sous un angle à la fois diachronique et sémiotique ou sémiologique d’abord, nous observerons que les expressions énonciatives, quelles que soient leurs catégories lexico-grammaticales originelles, correspondent toutes à une même sorte d’expressions linguistiques à l’arrivée, délivrées des contraintes de rection (au plan syntaxique) et de dénotation (au plan sémantique) associées à la fonction symbolique du langage. Qu’il s’agisse d’interjections, d’adverbes d’énonciation, de formules verbales parenthétiques ou autres locutions analogues, les expressions énonciatives ne sont pas des symboles, mais des indices (ou symptômes) consistant à coder les opérations pragmatiques susceptibles d’être effectuées dans le discours.
 
Sous un angle synchronique, ces opérations seront ensuite définies sur la base de deux principales distinctions segmentales au plan discursif, qui correspondent à deux niveaux d’opposition entre formules énonciatives. La première distinction, entre modalisateur de proposition simple et connecteur, a souvent été étudiée sous l’angle de ce qui oppose les plans énonciatif et respectivement textuel à l’intérieur du sens (chez Combettes, par exemple) ; ce qui a trait d’un côté à la subjectivité du locuteur ou énonciateur dans l’acte d’énonciation, et ce qui a trait d’un autre côté aux relations discursives entre différents actes à l’intérieur d’interventions (au sens Roulet) ou périodes discursives complexes (macro-syntaxiques, selon Berrendonner). Quant à la seconde opposition, elle repose sur ce qui sépare le niveau monologique d’une part, relatif à la construction des interventions ou périodes dont il vient d’être question, et le niveau dialogique d’autre part, qui concerne la construction des échanges (selon Roulet), et corrélativement les formules modales que nous dirons précisément dialogiques et parfois polyphoniques (par opposition aux simples modalisateurs ou connecteurs).

Séminaire ATILF

Sociolinguistique de l’oral et de l’écrit dans le Dictionnaire de Richelet (1680)

Christine Cuet (Université de Nantes)

3 juin 2011 | 10h30
Nancy | Campus Lettres et Sciences Humaines | ATILF | Bâtiment CNRS | Salle Paul Imbs

Résumé
La position de Richelet concernant la variation du français est très moderne car elle fait état de la variation sociolinguistique sans pour autant être prescriptive : « l’un et l’autre se dit » ou « l’usage est pour… » reviennent constamment dans les remarques de prononciation, qui nous renseignent sur les alternances vocaliques et consonantiques. Richelet recueille la prononciation des corps de métier, du parler populaire de Paris, du parler provincial qui « écorche les oreilles » (Normandie et Dauphinois)… Il y a « ceux qui parlent mal » et ceux qui ont le « bel usage » sans que ce dernier terme soit clairement défini. Richelet exprime surtout un constat, influencé probablement et reprenant certainement des remarques des prescripteurs de l’époque, mais sa propre formulation est rarement prescriptive, et les moqueries sont souvent dues à ses conflits personnels qu’il souligne nommément dans ses articles.
 
Richelet relève les variations sociolinguistiques et est en cela un témoin exceptionnel de la langue de la fin du 17ème siècle. Comme il l’exprime dans la Préface du Dictionnaire, son souci est de rendre compte au mieux de la langue de ces contemporains et d’aider les étrangers qui apprennent le français (sa source la plus importante de revenu ayant été l’enseignement du français aux étrangers). Outre sa valeur en tant que lexicographe, s’appuyant sur des citations d’auteurs contrairement à l’Académie qui s’appuie sur des exemples construits, Richelet apporte beaucoup à la connaissance des variétés du français à l’époque de Louis XIV, sur les plans de la prononciation et de l’orthographe, par ses remarques très nombreuses.
 
Je propose dans ma communication d’argumenter sur ce propos. Pour ma thèse (1987), j’avais relevé toutes les remarques concernant la prononciation et l’orthographe dans mon corpus. J’ai récemment traité statistiquement le corpus (environ 30 pages) qui concerne la formulation des remarques de prononciation. Je présenterai les alternances vocaliques et je comparerai les observations de Richelet à celle de Ménage.
Richelet s’inscrit dans une perspective ouverte, dans la lignée qui va de Vaugelas à Littré, par un mélange de citations d’auteurs et de références à la langue courante. Le principe de Richelet est d’enquêter et d’observer tout ce qui se dit ou s’écrit et de clarifier cette somme importante de données en délimitant précisément les différents usages.

Séminaire ATILF

De la variété lexicographique : analyse de trois dictionnaires contemporains

Christine Jacquet-Pfau (Collège de France)

27 mai 2011 | 10h30
Nancy | Campus Lettres et Sciences Humaines | ATILF | Bâtiment CNRS | Salle Paul Imbs

Résumé
Le dictionnaire d’usage est, pour un grand nombre d’utilisateurs, tous publics confondus (ou presque !), « la » référence, qui inscrit tel ouvrage précis (référencé notamment par son éditeur et son millésime) dans une perspective normative.
 
Contrairement à une certaine tradition qui a figé le dictionnaire comme « hors-discours », nous considérons au contraire le dictionnaire comme un des nombreux lieux discursifs. Il doit en effet être lu et analysé comme une description originale de la langue, d’un éditeur à l’autre, d’une époque à une autre, voire d’une année à l’autre chez un même éditeur. Or, que l’on analyse un dictionnaire donné dans une édition donnée ou, au contraire, plusieurs dictionnaires publiés la même année, nous constatons que la variété comme la variation y sont bien présentes.
 
Nous proposons d’analyser trois dictionnaires contemporains dans leur édition la plus récente (Le Petit Robert, Le Petit Larousse illustré et le Dictionnaire Hachette) et de montrer, d’une part, que la langue – le français en l’occurrence – est loin d’être figée et, d’autre part, que la description lexicographique qui en est faite donne place à des points de vue différents, exprimés à la fois par les lexicographes et par les éditeurs (dictionnairique) sur la langue, mais aussi sur la société. Seront abordés le discours sur la langue et sa description dans les préfaces et documents annexes, ainsi que quelques points particuliers tels que les choix opérés lors de la constitution de la nomenclature, la variation orthographique (y compris les propositions de réforme de 1990) et la féminisation.
 
Notre objectif est de montrer qu’un dictionnaire ne doit pas être enfermé dans une seule dimension normative ou prescriptive (trop souvent exprimée par une affirmation péremptoire telle que : « c’est écrit dans “ le ” dictionnaire »), mais qu’il doit être appréhendé par une lecture et une pratique ancrées dans la notion de variété / variabilité.
 
Notre réflexion s’appuie largement sur les pratiques exprimées et attestées par nos étudiants de premier cycle universitaire, voire de master. Elle se trouve plus largement confortée, au-delà de l’enseignement, par d’autres lectures, de celle de la documentaliste à celle de l’usager qui utilise un dictionnaire pour trouver la réponse à une interrogation orthographique, sémantique, voire grammaticale.
 
Nous considérons donc comme fondamental de développer, notamment dans le cadre de l’apprentissage, une lecture critique, multiple et, finalement, raisonné des dictionnaires.

Séminaire Syntaxe, Morphologie et Sémantique

La structure prosodique dynamique : une reformulation fonctionnelle-cognitive

Philippe Martin (Professeur à Paris 7 et directeur de l’EA ARP)

20 mai 2011 | 14h00
Nancy | Campus Lettres et Sciences Humaines | ATILF | Bâtiment CNRS | Salle Paul Imbs

Résumé
Que ce soit la théorie autosegmentale-métrique qui associe les formes générées par une grammaire aux événements prosodiques, ou les analyses basées sur des relations de dépendance, la plupart des modèles théoriques de l’intonation ont en commun une vision statique de la relation prosodie-syntaxe, dans laquelle les deux organisations, syntaxique et prosodique, sont analysées sans tenir compte de l’aspect dynamique du processus d’encodage et de décodage nécessairement réalisé au cours du déroulement de l’énoncé par l’auditeur lors de l’acte de parole.
 
Or, dans la parole spontanée, tout ne se passe pas comme si locuteur et auditeur connaissaient à l’avance tous les détails du déroulement et de l’élaboration des structures syntaxique et prosodique. L’émergence relativement récente de transcriptions et d’analyses de corpus spontanés a montré au contraire que de telles conditions ne se rencontrent en réalité que pour des énoncés lus, et que la production de parole spontanée implique des constructions dynamiques et non pas statiques des différentes structures.
 
Pour tenir compte de cette caractéristique dynamique, nous proposons une reformulation du concept de structure prosodique selon un mécanisme fonctionnel-cognitif qui rend également compte des nombreuses variantes observées dans les corpus de parole spontanée.

Séminaire ATILF

Combien faut-il de dictionnaires pour décrire le français ?

Nadine Vincent (Université de Sherbrooke, Canada)

29 avril 2011 | 10h30
Nancy | Campus Lettres et Sciences Humaines | ATILF | Bâtiment CNRS | Salle Paul Imbs

Résumé
Depuis le 17e siècle, la France a produit la presque totalité des dictionnaires de langue générale de la francophonie, d’abord pour des raisons de monopole, ensuite pour des raisons de démographie et de marché.
 
Au cours des dernières décennies, l’intégration dans les dictionnaires français de mots « régionaux » des français de Belgique, de Suisse, du Québec et d’Afrique s’est multipliée, au point de donner aujourd’hui l’illusion que tout francophone peut s’y retrouver.
 
Pour décrire les différentes variétés de français, peut-on se contenter de l’ajout de mots extra-hexagonaux dans les dictionnaires français ? Et même, en poussant l’exercice un peu plus loin, serait-il envisageable de regrouper en un seul ouvrage l’ensemble des variétés de français, en tenant compte des variations tant diatopiques que sociolectales ? Non. Parce que le français n’est pas constitué d’un tronc commun dont seules les ramilles et les feuilles varient d’un territoire à l’autre. Et parce qu’un dictionnaire n’est pas un recensement objectif des ressources d’une langue.
 
Passons rapidement sur la question de la nomenclature, qui a été maintes fois traitée. Cet apport cosmétique qui sert d’argument de vente hors de France n’est en fait qu’un appât pour convaincre les utilisateurs qu’ils pourront y trouver leur compte.
 
Nous avons consacré à ces variantes, en les indiquant par une marque spécifique, une place réduite mais suffisante pour que chacun, où qu’il soit, ait une relation de complicité avec son Petit Larousse (préface du Petit Larousse 1999 citée dans Garnier, 2005 : 226).
 
Intimement liée à la question de l’enrichissement de la nomenclature, se pose la délicate question de la description de ces spécificités, question qui a, elle aussi, été amplement débattue (voir notamment Boulanger 2005, Mercier 2008, Verreault et Galarneau 2009).
 
Une fois prise la décision d’inclure des mots des français hors de France, se pose le problème de leur traitement. C’est en effet tout un défi pour le lexicographe que de parler de l’identité de l’autre dans sa langue à lui [?] à la satisfaction des deux parties (Poirier, 2003 : 211)
 
En effet, au-delà des éléments différentiels identifiables et perfectibles, c’est toute la métalangue d’un dictionnaire qui est marquée par la variation, tout le tissu idéologique aussi, qui est propre à une société dont le dictionnaire se veut le miroir, et qui ne peut satisfaire des locuteurs occupant des espaces culturels, géographiques et politiques distincts.
 
À partir de l’expérience concrète du Dictionnaire de la langue française : le français vu du Québec[1] , actuellement en cours de production[2] , nous nous proposons d’analyser quelques-unes de ces dimensions profondes de la variation qui rendent illusoire la description objective d’un français « partagé ».
 
Cette « québécisation » d’un dictionnaire élaboré au Québec se manifeste aussi bien dans la politique éditoriale (choix des indicateurs, traitement des anglicismes, féminisation des titres, etc.) que dans la différence de perspective (rapport à l’histoire, à l’espace, à la langue, nordicité, américanité, etc.).
 
Ultimement, comme l’outil servant à décrire la langue est la langue elle-même, on retrouve la « variété » québécoise dans les définitions, les exemples et les citations d’emplois non marqués.
 
À l’évidence, une seule image ne peut suffire à illustrer l’ensemble des usages de la francophonie. C’est plutôt une mosaïque qu’il faut s’atteler à construire, et dans cette oeuvre collective, chacun doit polir sa pierre.

 

BIBLIOGRAPHIE
BOULANGER, Jean-Claude (2005) « L’épopée du Petit Larousse au Québec de 1906 à 2005 », dans Monique Cormier et Aline Franoeur (dir.), Les dictionnaires Larousse, genèse et évolution, Les Presses de l’Université de Montréal, p. 249-276.

GARNIER, Yves (2005) « Les francophonismes dans le Petit Larousse », dans Monique Cormier et Aline Francoeur (dir.), Les dictionnaires Larousse, genèse et évolution, Les Presses de l’Université de Montréal p. 219-248.

MERCIER, Louis, (2008) « Travailler depuis le Québec à l’émancipation de la lexicographie du Français », dans Claudine Bavoux (dir.), Le français des dictionnaires. L’autre versant de la lexicographie française, De Boeck éditeur, p. 289-308.

POIRIER, Claude (2003) « Variation du français en francophonie et cohérence de la description lexicographique » dans Monique Cormier, Aline Francœur et Jean-Claude Boulanger (dir.), Les dictionnaires Le Robert : genèse et évolution , p. 189-226

VERREAULT, Claude et Annie Galarneau (2009) « L’inclusion des particularismes extra-hexagonaux dans la dernière édition du Grand Robert : réalité ou mirage de la francophonie ? » dans International Journal of Lexicography, Oxford University Press, Vol. 22(3) : 259-280.

 

1. Le projet s’inscrit dans le cadre des travaux du Centre d’analyse et de traitement informatique du français québécois (CATIFQ), et plus particulièrement du groupe de recherche FRANQUS (Français Québécois : Usage Standard) de l’Université de Sherbrooke. Pour plus d’informations, consulter le site du projet : franqus.ca.

2. Près de 35 000 articles sont déjà consultables en ligne, gratuitement, sur inscription.

Séminaire Syntaxe, Morphologie et Sémantique

Les contours montants non terminaux du Français : contraste, opposition et distribution

Elisabeth Delais-Roussarie (CNRS, UMR 7110 / Laboratoire de Linguistique formelle, Université Paris-Diderot)

15 avril 2011 | 10h30
Nancy | Campus Lettres et Sciences Humaines | Salle A

Résumé
L’intonation du français se caractérise par l’utilisation de nombreux contours montants et montants-descendants. Ces derniers apparaissent en fin d’énoncés, comme, par exemple, en fin de questions déclaratives (cf. contour d’interrogation chez Delattre (1966)) ou en fin d’énoncés assertifs avec une valeur particulière (cf. contour d’implication).
(1) Pierre est venu ?
(2) A : Qui est le père ?
B : Julien ! évidemment !
 
Les contours montants apparaissent aussi en fin d’unités prosodiques non-terminales. Ils sont alors souvent regroupés dans la « catégorie » des contours de continuation.
(3) Chaque après-midi, les enfants viennent.
(4) Le fils ainé de mon voisin est venu.
(5) Elle est jeune, elle habite dans la banlieue lyonnaise, et elle s’appelle Melodine.
 
Nous nous intéressons plus particulièrement à cette dernière catégorie de contours montants. Notre interrogation est double :
– savoir si ces contours peuvent tous être regroupés dans une même classe phonologique, leur réalisation étant alors liée à leur position, ou s’il est pertinent de distinguer, comme le fait Delattre (1966), le contour de continuation mineur et le contour de continuation majeur ;
– savoir si la distinction entre ces contours et les contours montants et montants-descendants de fin d’énoncé (cf. (1) et (2)) peut être établie comme catégorielle sur les plans phonétique et phonologique, ou si la distinction naît essentiellement de leur distribution.

 
Tenter de répondre à ces questions nous semble essentiel non seulement pour avancer vers la construction d’un inventaire structuré des contours intonatifs du français, mais également pour mieux appréhender l’opposition phonologie/ phonétique en intonation.

Séminaire ATILF

Genèse et développement de la catégorie du neutre

Tania Paciaroni (Universität Zürich)

15 avril 2011 | 10h30
Nancy | Campus Lettres et Sciences Humaines | ATILF | Bâtiment CNRS | Salle Paul Imbs

Résumé
La recherche sur les langues romanes est depuis longtemps traversée par un débat, toujours vif, sur la manière dont le système du genre, et en particulier le neutre latin, s’est développé du latin au roman. Dans presque toutes les langues romanes modernes, les noms appartiennent soit au masculin, soit au féminin, tandis que les noms neutres du latin ont été réaffectés principalement au masculin, et en partie au féminin. Pour cette raison, de nombreux chercheurs (probablement la majorité) ont supposé que cette réduction d’un système tripartite à un système bipartite doit s’être produite au stade proto-roman. Dans cette communication qui reprend l’analyse proposée dans Loporcaro & Paciaroni (2011), nous montrerons que cette idée largement répandue néglige l’existence d’une quantité considérable de preuves venues de tous les rameaux de la famille romane, voire l’existence de systèmes à quatre genres dans une partie non négligeable de la Romania – fait passé inaperçu jusqu’ici. Nous nous livrerons à une analyse des données romanes pertinentes, à une comparaison sommaire avec d’autres systèmes de genre décrits dans la recherche en typologie linguistique, ainsi qu’à une reconstitution détaillée de la façon dont les systèmes de genre en question pourraient s’être développés durant la transition du latin au roman.

 

LOPORCARO Michele & Tania PACIARONI, 2011, « Four-gender systems in Indo-european ». Folia linguistica, 45/2.

Séminaire ATILF

Les dictionnaires et l’emprunt : métalexicographie et histoire d’une idée linguistique

Agnès Steuckardt (Université de Provence)

8 avril 2011 | 10h30
Nancy | Campus Lettres et Sciences Humaines | ATILF | Bâtiment CNRS | Salle Paul Imbs

Résumé
La définition linguistique de l’emprunt n’est pas, aujourd’hui encore, absolument stabilisée : la notion de xénisme en particulier prête à des interprétations différentes. A fortiori, si l’on remonte vers les périodes où la linguistique n’est pas constituée en tant que discipline autonome dans le champ de la connaissance, l’emprunt linguistique apparaît comme une notion en cours de constitution. C’est cette émergence, depuis les premiers dictionnaires, d’une notion linguistique que nous proposons de suivre, en nous appuyant sur les travaux présentés lors du colloque « Les dictionnaires et l’emprunt » (Aix-en-Provence, mai 2009), et publiés en 2011 aux Publications de l’Université de Provence.
 
Le caractère non standardisé de la rédaction, dans les plus anciens dictionnaires de la langue française – auxquels nous nous intéresserons plus particulièrement ici –, s’il peut apparaître, au regard de l’art lexicographique, comme une insuffisance, devient un avantage lorsqu’il s’agit de comprendre un processus de conceptualisation en cours. On montrera dans un premier temps combien variées sont, du XVIe au XVIIIe siècle, les manières d’indiquer l’emprunt. Pris de, tiré de, écorché de, mot latin, mot italien, anglicisme : autant d’indicateurs dont on ne sait au juste si la fonction est de fournir au lecteur curieux une information érudite, ou de mettre en garde sur une intégration imparfaite dans la langue française. Cette équivoque du discours lexicographique révèle une hésitation sur le concept même : relève-t-il de la pure description diachronique, ou bien doit-il aussi être appréhendé, en synchronie, comme un point fragile de la norme lexicale ?
 
L’entrée de la lexicographie dans l’ère de la modernité, à laquelle on viendra ensuite, n’a pas véritablement résolu la question. La standardisation du discours lexicographique a, apparemment, confiné l’indication d’emprunt dans la rubrique consacrée à l’étymologie. Cependant, les sélections de la nomenclature, les choix et informations phonétiques et graphiques impliquent, de fait, l’existence d’une réflexion sur l’intégration du mot emprunté. Méfiance à l’égard d’un concept imparfaitement théorisé ? Réticence à prononcer des jugements d’intégration sujets à caution ? Les dictionnaires contemporains laissent, pour une large part, dans l’ombre la question de l’emprunt.

Séminaire Syntaxe, Morphologie et Sémantique

Les conversions de nom à verbe et de verbe à nom en français

Delphine Tribout (docteur, LLF)

25 mars 2011 | 14h15
Nancy | Campus Lettres et Sciences Humaines | ATILF | Bâtiment CNRS | Salle Paul Imbs

Résumé
Mené dans le cadre de la morphologie lexématique ce travail est consacré à deux procédés de formation de lexèmes en français : la conversion de nom à verbe et la conversion de verbe à nom. Les aspects à la fois formels et sémantiques des deux procédés sont présentés. Dans un premier temps les deux propriétés caractéristiques de la conversion sont discutées, à savoir l’appartenance des deux lexèmes à des catégories lexicales différentes, et l’identité phonologique des deux lexèmes, puis les données qui relèvent ou non d’une conversion de nom à verbe ou de verbe à nom au regard de ces deux propriétés sont circonscrites. Dans un second temps la question de l’orientation de la conversion est traitée et les critères qui sont traditionnellement utilisés pour déterminer l’orientation d’une paire nom/verbe en relation de conversion sont évalués. Je montre que ces critères ne sont pas satisfaisants et je propose un nouveau critère plus fiable, qui repose sur l’analyse morphologique des lexèmes. Sur la base de ce critère d’autres indices de l’orientation de la conversion sont recherchés, mais la conclusion qui s’impose est que, dans la plupart des cas, l’orientation ne peut être établie sur la base de critères linguistiques. Dans un troisième temps les propriétés morphophonologiques et sémantiques des deux conversions sont étudiées.

 

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Séminaire ATILF

Expression de mouvement en L1 et en L2. Etudes sur un corpus de productions orales

Urszula Paprocka-Piotrowska (Université Catholique de Lublin, Pologne)

18 mars 2011 | 10h30
Nancy | Campus Lettres et Sciences Humaines | ATILF | Bâtiment CNRS | Salle Paul Imbs

Résumé
L’approche fonctionnelle (comprenant la langue comme instrument de communication opérant à des niveaux différents et dans sa relation au contexte), où nous nous situons, a donné la vie à toute une suite de travaux empiriques en acquisition, centrés explicitement sur le verbe, le plus souvent dans une des deux optiques complémentaires : morphologie temporo-aspectuelle (i) et sémantique lexicale des procès (ii) ou interaction entre conceptualisation et formulation. De son côté, des études du domaine de la sémantique lexicale des procès (ii) et/ou différences typologiques entre langues dans le traitement linguistique des événements ont abouti à de nombreuses conclusions dont quatre sont particulièrement intéressantes pour notre propos :

  • des locuteurs de langues différentes parlent d?une manière différente du même contenu informationnel à transmettre ; ils sélectionnent systématiquement des éléments différents pour la mise en mots, si la sélection porte sur des éléments identiques, ils les présentent dans des perspectives différentes ;
  • le lexique verbal est central dans le développement de la langue ; l?organisation du lexique verbal est variable selon les langues et les langues se caractérisent typologiquement par des schèmes différents de lexicalisation des procès ;
  • l’aspect verbal est une propriété structurelle qui influe fortement sur les schèmes de construction d?événements ;
  • selon les langues et leurs caractéristiques internes, un petit nombre de verbes spécifiques (p. ex. verbes de base), peuvent occuper une place importante du fait de leur emploi fréquent par les locuteurs natifs et par leur mobilisation dans les productions des apprenants.

L’étude que nous souhaitons présenter se situe donc au croisement des deux domaines d?investigation (le système temporo-aspectuel et la sémantique du verbe) et constitue une tentative de rapprochement de ces deux orientations de recherches, pour deux langues typologiquement différentes : le français (langue romane) et le polonais (langue slave).

Séminaire ATILF

Lexique et inscription générique du songe dans la littérature française du XIe au XIVe siècle

Alain Corbellari (Université de Lausanne, Suisse)

4 mars 2011 | 10h30
Nancy | Campus Lettres et Sciences Humaines | ATILF | Bâtiment CNRS | Salle Paul Imbs

Résumé
Les rêves insérés dans la littérature narrative du Moyen Age ont la fâcheuse réputation d’être répétitifs. Cependant, il existe presque autant de types de rêve qu’il y a de genres littéraires aux XIIe et XIIIe siècles. On peut même dire que la position que les narrateurs adoptent face à la représentation onirique est un indice souvent très fiable de leur volonté d’inscription au sein de tel ou tel genre. A l’aide d’un corpus d’à peu près 250 rêves, pour la seule littérature en ancien français et en ancien occitan, on aimerait proposer ici de décrire dans le détail de leur fonctionnement quelques-uns de ces types, d’en examiner les marges de manoeuvres, voire les distorsions, et de suggérer quelques propositions synthétiques permettant d’articuler une théorie linguistique et littéraire du rêve inséré dans la littérature médiévale.

Séminaire ATILF

English lexical borrowing from French : some neglected aspects

Philip Durkin (Oxford English Dictionary)

25 février 2011 | 10h30
Nancy | Campus Lettres et Sciences Humaines | ATILF | Bâtiment CNRS | Salle Paul Imbs

Résumé
It is well known that English borrowed very many words from French in the Middle English and early modern English periods (c1150-c1500 and c1500-c1700). Histories of English normally focus on borrowing from French in the centuries following the Norman Conquest, and on borrowing directly from Latin in the early modern period. However, the continuing lexical influence of French in later centuries is often neglected.
 
Recent research has identified that a large proportion of the words which came into English from Latin or French could theoretically have come from either language. Close attention to the lexicographical record for French and English suggests that in many cases borrowing was partly from French and partly from Latin.
 
Additionally, even in the sixteenth century French translations of Latin and Greek works often acted as the intermediary for borrowing into English.
 
Traditionally scholarship has focused on dates of first attestation. Even by this measure, the level of borrowing from French remained very high right through the early modern period. Borrowing directly from Latin increases dramatically, but the level of borrowing from French remains fairly constant.
 
Paying attention only to dates of first attestation can sometimes give a distorted picture. Many borrowed words show a very gradual increase in frequency : this could result from internal spread in English, between dialects, and between registers, stylistic levels, etc. ; or it could result from reinforcement from the donor language. Reinforcement from French is clearly shown when we find continuing borrowing of forms and/or senses from French, often centuries after the initial borrowing of a word into English.
 
The rich lexicographical resources available today for English and French enable etymologists of English to give a much more rounded picture of French lexical influence on English.

Séminaire Syntaxe, Morphologie et Sémantique

Quelques aspects de la préfixation en anti-

Nabil Hathout (CLLE-ERSS, Toulouse)

4 février 2011 | 14h15
Nancy | Campus Lettres et Sciences Humaines | ATILF | Bâtiment CNRS | Salle Paul Imbs

Résumé
Je m’intéresserai dans cet exposé aux aspects catégoriel, sémantique et formel de la préfixation en anti-. Le premier point abordé est celui de la catégorie de anti-. On trouve en effet, parmi les séquences qui apparaissent après anti-des noms communs au singulier ou au pluriel, des noms propres, des composés VN lexicalisés ou non, des syntagmes nominaux sans déterminant ou avec déterminant, des pronoms, des interjections, des groupes propositionnels, des adjectifs et des verbes à l’infinitif. Cette variété soulève plusieurs questions : anti- est-il un préfixe ou une préposition ? Existe-t-il une préposition anti similaire à contre ? Si c’est un préfixe, quel est le statut des radicaux syntaxiques et des radicaux au pluriel ? Je détaillerai ce petit inventaire des objets qui apparaissent après anti- et je les comparerai à ceux que l’on trouve devant différents suffixes.
 
Je proposerai ensuite une description de la sémantique de la préfixation en anti- basée sur deux critères : l’alternance entre les interprétations endocentriques et exocentriques et les types d’emplois, spatiaux, logiques et adversatifs. Je montrerai que ces deux critères sont indépendants et qu’il est possible d’exhiber des exemplaires pour cinq des six configurations possibles.
 
J’aborderai pour finir la question des dérivés dits parasynthétiques comme antiparlementaire ou antigrippal. Ces dérivés sont traditionnellement analysés comme des mots construits par parasynthèse, c’est-à-dire par une opération qui comporte simultanément une préfixation (en anti-) et une suffixation (en -aire, resp. -al). J’en propose une analyse différente formulée en termes d’emprunt de radicaux. Cette analyse s’inscrit dans le cadre d’un modèle théorique à quatre niveaux dont je présenterai les grandes lignes.

Séminaire Syntaxe, Morphologie et Sémantique

L’enquêteur, le surveillant et le détenu : étude des noms déverbaux de participants aux événements

Elena Soare (Université Paris 8)

28 janvier 2011 | 14h15
Nancy | Campus Lettres et Sciences Humaines | salle B

Résumé
Cette présentation étudiera les noms déverbaux dénotant des participants aux événements (agent, patient, siège, etc.) en français. Nous allons d’abord montrer que les noms en –eur, soi-disant des noms d’ « agent », se classent en trois catégories : des noms épisodiques, des noms dispositionnels et des noms d’objet référentiels. Les classifications bipartites (qui opposent [inanimé] vs. [événementiel] comme Levin & Rappaport-Hovav (1992), ou [épisodique] vs. [dispositionnel] comme Alexiadou & Schäfer à paraître), ne sont pas adéquates pour capturer les propriétés de ces noms, au moins en français. Nous montrerons également que l’interprétation événementielle de ces noms est en rapport direct, non seulement avec la présence, mais plus particulièrement avec la nature spécifique / non-spécifique de la structure argumentale qu’ils réalisent, ce qui est un raffinement des prédictions faites dans les études classiques sur les déverbaux événementiels (à commencer par Grimshaw 1990). Cette contrainte fonctionne, cependant, seulement pour les nominalisations d’arguments : les noms en –ant, en compétition apparente avec les –eur, présentent un fonctionnement différent lié dans ce cas à la nominalisation d’une structure phrastique entière. Cela implique un héritage des propriétés aspectuelles propres au groupe verbal interne, mais aussi un changement aspectuel induit par le fait qu’il s’agit de la nominalisation d’une prédication, contribuant de la stativité. Les noms d’argument interne, à savoir les noms en –é/-i/-u nominalisant des participants passifs aux événements, confirment la généralisation dérivée pour les –eur, puisque ceux-ci réalisent par défaut une structure argumentale spécifique et ne peuvent être qu’épisodiques. Le tableau général auquel nous aboutissons permet d’expliquer la manière dont les propriétés des prédicats nominalisés sont héritées dans les noms de participants aux événements, en montrant comment la généricité et l’épisodicité sont structuralement héritées ou contribuées dans ces nominalisations.

Séminaire ATILF

Présentation du dictionnaire des Associations Verbales du français

Michèle Debrenne (Université d’Etat de Novossibirsk, Russie)

21 janvier 2011 | 10h30
Nancy | Campus Lettres et Sciences Humaines | ATILF | Bâtiment CNRS | Salle Paul Imbs

Résumé
Ces dernières années l’auteur a participé à l’élaboration d’un nouveau dictionnaire, le Dictionnaire des Associations verbales du Français. Après les premiers travaux sur l’anglais [Kiss 1974], au cours des vingt dernières années le concept de « dictionnaire d’association » a été mis au point par les psycholinguistes de l’Institut de Linguistique de Moscou et réalisé pour le russe, plusieurs langues slaves, l’espagnol [Русский… 1994, Санчес 2001, Славянский… 2004]. De novembre 2008 à décembre 2009, 5500 étudiants francophones de 600 villes de France ont participé sur Internet à l’expérience psycholinguistique suivante : D’après une liste de 1100 stimuli, formée des mots pleins les plus fréquents du français, chaque participant à l’expérience s’est vu proposer 100 mots, auxquels il devait donner en 15 minutes maximum la première association apparue à son esprit : par exemple, le mot « politique » a pu évoquer pour les uns « gouvernement » ou « président » mais pour d’autres « parler », « mensonge », voire « pff » ou certains noms propres. Le dictionnaire direct présente la liste alphabétique des stimuli et des réponses qu’ils ont provoquées, accompagnées du nombre de fois où chaque réponse a été citée ; A la fin de chaque article on indique le nombre de fois où ce mot à été présenté, le nombre de réponses différentes, celui des refus de réponse et des réponses uniques (citées par une seule personne). Ainsi, pour le stimulus « chien » on obtient : chat (391), animal (26), aboyer (10), niche (8), os (8), aboiement (7), compagnon (6), laisse (6), compagnie (5), poil (5), aboie (4), labrador (4), chienne (3), collier (3), ami (2), berger (2), domestique (2), fidèle (2), poils (2), adoré (1), amour (1), attachant (1), battu (1), belle (1), bonté (1), bruyant (1), caca (1), caniche (1), canidé (1), canin (1), chatte (1), chienchien (1), con (1), courant (1), croc (1), dalmatien (1), dangereux (1), de garde (1), dents (1), dogue (1), dromadaire (1), encore! (1), épagneul breton (1), et chat (1), facteur (1), fidélité (1), fou (1), frère (1), galeux (1), gentil (1), grogner (1), gueule (1), iggy pop (1), joie (1), langue (1), loup (1), loyal (1), méchant (1), meilleur ami de l’homme (1), merde (1), mot (1), non (1), promenade (1), puanteur (1), queue (1), restreint (1), teckel (1), temps (1), tishka (1), truffe (1) (550, 70, 3, 51).
 
Le dictionnaire inverse est formé de la liste des réponses obtenues au cours de l’expérience, avec les stimulis auxquelles elles sont associées, par exemple la réaction « langue » a été donnée aux stimuli suivants : français (158), bouche (41), goût (49), parole (25), parler (22), signe (20), embrasser (17), lèvre (13), palais (12), expression (8), un étranger (8), mot (6), étranger (5), pays (5), cheveu (5), comprendre (6), dent (4), tirer (3), mot (3), prononcer (3), joue (3), voix (3), conversation (2), cours (2), phrase (2), cheveu (1), ton (1), chanter (1), caractère (1), accord (1), courant (1), connaissance (1), chien (1), connaître (1), conversation (1), discours (1), ton (1), tenir (1), mêler (1), poésie (1), système (1), nez (1), usage (1), manier (1), lettre (1), prononcer (1), un anglais (1), vue (1) (443, 48). Les chiffres accompagnant chaque stimulus indiquent le nombre de fois où cette réaction est apparue, les chiffres de la fin de l’article – le nombre total d’occurences de la réaction donnée et le nombre de stimuli différents auxquels elle est associée.
 
Environ la moitié des réponses sont individuelles, ce qui concorde avec les chiffres obtenus par les collègues dans les autres expériences d’associations verbales. Contrairement à l’impression première selon laquelle nous sommes tous différents et les associations seraient foncièrement individuelles, au cours de l’expérience on a pu rapidement mettre en évidence un noyau très stable de mots le plus souvent cités comme association avec un très grand nombre de stimuli. On peut afffirmer que ces mots sont les plus importants de la langue française, puisqu’ils viennent le plus souvent à l’esprit de ses locuteurs. Ce « noyau de la langue » est comparable à celui obtenu pour d’autres langues pour lesquels ce genre de recherche a été effectué et commence par les mots suivants : vie (378) ; amour (312) ; homme (212) ; joie (196) ; mort (196) ; temps (192); travail (187) ; argent (182) ; enfant (182) ; donner (180) ; ami (178) ; bonheur (178) etc.
 
Toutes ces données sont accessibles en ligne sur un site où les utilisateurs peuvent faire des recherches par critères croisés (d’après les données de chaque formulaire rempli en ligne (âge, ville, formation, sexe etc.) et en version papier, éditée par l’Université d’Etat de Novossibirsk ;
 
Les dictionnaires d’associations verbales offrent une source inépuisable de données pour les études les plus diverses : études de sémantique, bien sûr, mais aussi de psycho- et sociolinguistique, offrant un portrait instantané de l’état de la langue à un moment donné de son histoire, ou bien chez un locuteur donné. Elles permettent d’améliorer la qualité des traductions et celle des comparaisons socio-culturelles. Nous sommes par ailleurs persuadés qu’ils sont indispensables dans l’étude du FLE. Le dictionnaire inverse permet, mieux que les listes de fréquences établies il y a longtemps sur un corpus écrit, de déterminer quel lexique enseigner en premier lieu car c’est celui-là qui sera le plus important dans la communication avec les locuteurs francophones. Le dictionnaire direct permet, quant à lui, de savoir quels mots enseigner ensemble – pour que les locuteurs étrangers et les locuteurs français se comprennent, il est indispensable qu’ils sachent quelles associations évoque tel ou tel mot. Ainsi l’apprenant devra savoir, qu’en premier lieu « pain » évoque pour un Français mie, et seulement ensuite vin, baguette, beurre , farine, ou manger, tandis que le mot « fromage » (qui ne figure pas dans la liste de stimuli) vient à l’esprit des locuteurs français à propos des mots pain, frais, morceau, président, odeur etc. Il semble important de tenir compte de ces données lors de l’établissement de nouveaux manuels de FLE et d’exercices de vocabulaire.

 

Bibliographie

Kiss, G.R., Armstrong, C., Milroy, R., and Piper, J. (1973) An associative thesaurus of English and its computer analysis. In Aitken, A.J., Bailey, R.W. and Hamilton-Smith, N. (Eds.), The Computer and Literary Studies. Edinburgh: University Press.

Русский ассоциативный словарь. (Ассоциативный тезаурус современного русского языка.) Кн. 1: Прямой словарь: от стимула к реакции. М., 1994; Кн. 2: Обратный словарь: от реакции к стимулу. М., 1994;

Санчес Пуиг, М. Ассоциативные нормы испанского и русского языков = Normas asociativas del espanol y del ruso / М. Санчес Пуиг, Ю. Н. Караулов, Г. А. Черкасова ; Рос. акад. наук, Отд-ние лит. и яз., Мадрид. гос. ун-т Комплутенсе. – М. ; Мадрид : Азбуковник, 2001. – 493 с. – Парал. тит. л. исп.

Славянский ассоциативный словарь: русский, белорусский, болгарский, украинский / Н.В. Уфимцева, Г.А.Черкасова, Ю.Н.Караулов, Е.Ф.Тарасов. М., 2004. 792 с.