Anissa Hamza Jamman

Entretien avec Anissa Hamza-Jamann

« Quel est votre parcours ? »

Originaire de Bejaïa, j’ai commencé mes études en Algérie. Après un baccalauréat en lettres et langues étrangères, je me suis inscrite en Licence de Sciences du langage à l’université de Abderrahmane Mira à Bejaïa (Algérie). J’ai poursuivi avec un master en Didactique de l’anglais, ce qui m’a incitée à m’intéresser par la suite aux aspects interculturels sous-tendus par la langue. J’ai ainsi décidé de quitter l’Algérie pour rejoindre l’université de Strasbourg en 2011 au département de LLCER anglais qui m’a accueillie pour un Master en Mondes Anglophones où je me suis spécialisée en linguistique contrastive (branche de la linguistique appliquée). Fascinée par les phénomènes linguistiques et langagiers, je me suis alors engagée dans la poursuite d’une thèse de doctorat où j’ai été confrontée à une variété de domaines. Rattachée au Laboratoire linguistique, Langue et Parole (LiLPa à Strasbourg), j’ai ainsi mené cette recherche sur la détection et la traduction automatiques de l’ellipse (phénomène linguistique) dans un corpus multi-discours anglais-français, sous la double direction d’une linguiste et d’une informaticienne. Or, son déroulement s’est trouvé bouleversé par le développement rapide de la traduction neuronale (2017) nécessitant une mise à jour de mes objectifs initiaux. Ma thèse s’est retrouvée alors à la croisée de plusieurs disciplines : linguistique théorique, linguistique contrastive et de corpus, traitement automatique des langues (TAL) et traductologie. A l’origine, l’ensemble des disciplines qui la constituait prenait racine dans la linguistique théorique, mais l’accélération d’événements extérieurs a accentué un éclectisme que révélait déjà la soutenance de ma thèse à travers mon parcours pluridisciplinaire.
Tout en travaillant à ma thèse, j’ai enrichi mon expérience par des séjours de recherche en France (notamment au laboratoire LIMSI à Paris) et à l’étranger (chercheur associé à l’université de UCSC Santa-Cruz, Californie, USA), mais aussi par des rencontres stimulantes autour des communications nationales et internationales.
Après l’obtention de mon doctorat, j’ai exercé pendant deux ans en tant qu’Attachée Temporaire d’Enseignement et de Recherche (ATER) au Département de Linguistique Appliquée et de Didactique des Langues (DLADL) de l’université de Strasbourg. Ces années de pratique m’ont permis de vivre ma passion, c’est à dire le partage des connaissances sur l’enseignement des langues et des recherches sur les langues elles-mêmes. Ces années m’ont permis également de travailler au sein d’une équipe de collègues engagés pour y assumer diverses responsabilités, dont principalement, la participation à des projets autour de l’interculturalité (INJEU) en collaboration avec l’université de Sarrebruck et la mise en place de nouveaux dispositifs relatifs à l’enseignement du FLE (EPICUR) avec ma collègue Julia Pustche, MCF-HDR à l’université de Strasbourg.
Qualifiée aux fonctions de MCF en sections 7 (Sciences du langage) et 11 (anglais) du CNU, j’ai été recrutée en 2022 en tant que Maitre de conférences à l’INSPE de Lorraine pour enseigner la didactique des langues aux étudiants MEEF à Montigny-lès-Metz).

« Sur quelle thématique travaillez-vous et quelles en sont les applications ? »

Linguiste au départ, mes recherches suivent deux orientations :
La première s’intéresse aux problématiques relatives à l’enseignement et à l’apprentissage des langues et des cultures. Ayant moi-même baigné dès l’enfance dans un contexte multilingue, le passage d’une langue à une autre m’a toujours intéressée. Parmi ces intérêts, je citerai les littéracies universitaires et numériques, l’identité professionnelle des futurs enseignants en langues et cultures étrangères et l’interculturalité dans les échanges et les dispositifs en ligne (INJEU & EPICUR). J’ai aussi récemment rejoint le groupe de travail sur le projet IdProf coordonné par ma collègue Séverine Behra, maître de conférence à l’UL-INSPE et membre de l’ATILF dans la même équipe de recherche que la mienne. Cette orientation a émergé pour répondre à mon envie d’établir un lien entre mes recherches et la formation que j’assure auprès des étudiants et garder ainsi un œil ouvert sur leur insertion professionnelle dans une réalité du terrain.
La deuxième orientation est celle qui me fait m’intéresser de près aux nouvelles technologies et à l’IA. Je poursuis en effet mes recherches doctorales en linguistique et en traduction automatique pour explorer les perspectives dégagées dans ma thèse de Doctorat. Je travaille ainsi sur l’utilisation didactique des outils de traduction automatique dans l’enseignement supérieur auprès de mes collègues Nicolas Molle, Guillaume Nassau et al. (Membres de l’ATILF). L’enjeu est d’examiner les transitions potentielles induites par la traduction automatique et le développement des outils de TA dans les cours de langues. Parallèlement à ce projet, je suis également membre associée au Loria J’ai rejoint depuis décembre l’équipe Smart sur un projet visant la détection des fakenews arabes dans les médias sociaux. Mon rôle est de contribuer à ce projet en tant que linguiste sur la classification et les représentations susceptibles d’aider à détecter automatiquement les fakenews, et d’intervenir ensuite au niveau du traitement et de la traduction de la parole code-switchée.

« Pourriez-vous partager avec nous ce qui vous a poussée à faire ce métier ? »

J’aime beaucoup travailler en équipe, communiquer sur mes recherche, interagir avec les autres chercheurs dans des colloques ou rencontres scientifiques. La remise en question quotidienne que cette profession requiert est peut-être ce qui m’a encouragée à la choisir. Il s’agit en effet d’exercer un métier « en mouvement », un métier qui évolue constamment en fonction d’un éventail de paramètres, en un mot, c’est un métier vivant qui me laisse croire que je n’exerce pas une simple et unique profession, mais plusieurs à l’intérieur d’une seule, attractive et ouverte à d’autres horizons.

« Quels conseils souhaiteriez-vous adresser à des jeunes filles et/ou femmes qui s’orienteraient vers la Recherche et/ou l’enseignement supérieur ? »

Je crois qu’il n’y pas de secret là-dedans. Le même conseil pour chaque chose qu’on entreprend dans sa vie : se laisser surprendre pour évoluer, y croire pour y arriver et savoir prioriser l’essentiel pour s’épanouir dans ce que l’on fait !

 

Aller plus loin

Écouter Anissa Hamza-Jamann lors d’une table ronde dans l’émission Women voice diffusée par Radio Campus Lorraine le 8 mars 2023 à 13h.

 

Contact

Anissa Hamza-Jamann | | Page perso
Maître de conférences en Sciences du langage – Didactique des langues
ATILF, Axe Didactique des langues et sociolinguistique

 

Mars 2023 | © service communication ATILF | photo E. Gentner